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plus perpétuelle ; elle cesse de plein droit après l’extraction complète des substances concédées ; elle peut également être abandonnée par le concessionnaire ou lui être retirée par déchéance, quand il cesse d’exploiter ou qu’il néglige de payer la redevance due à l’État ; et cette redevance, applicable aux anciennes concessions comme aux nouvelles, est, par rapport à la surface concédée, non-seulement proportionnelle, mais progressive ; on compte ainsi ramener, bon gré mal gré, le périmètre des concessions actuelles à une moindre étendue. Quant aux concessions futures, le projet de loi établit, d’après la nature des substances, un maximum de superficie : 800 hectares pour les mines de combustibles, 500 hectares pour les autres.

Que ces innovations soient graves, la chose est visible. Mais qu’elles soient en opposition formelle avec la loi de 1810, — telle du moins qu’on la comprend aujourd’hui, — nous n’oserions l’affirmer. La conception première de Napoléon a été si subtilement commentée, l’esprit administratif a si bien fait son profit de ce qu’elle renfermait d’élémens contradictoires et équivoques, qu’avec une égale sincérité de part et d’autre, on a pu l’invoquer dans les deux sens. Si la mine appartient à l’État, tout s’explique : l’adjudication, la déchéance, la suppression des redevances attribuées au propriétaire de la surface : alors, en effet, la redevance tréfoncière n’était qu’une mesure de circonstance ménageant la transition entre le régime du code civil et celui des concessions ; il est grand temps qu’elle disparaisse ; — l’État adjugeant les mines ou accordant la préférence à l’inventeur, c’est le propriétaire disposant de son bien comme il l’entend, et il n’est même pas besoin d’un texte de loi pour l’y autoriser ; — la déchéance enfin, c’est l’application du droit commun : les concessionnaires n’avaient été mis là par le gouvernement que pour exploiter en son nom ; en manquant à cette condition implicite de leur titre, ils encourent la révocation, comme tout acquéreur ou donataire. Il n’est pas jusqu’aux mesures de coercition fiscale qu’on prendra pour les contraindre à exécuter leur traité, qui, dans cet ordre d’idées, ne semblent de bonne justice. Mais supposons, au contraire, que, dès avant la concession, la mine soit déjà propriété privée ; que celui à qui elle appartient ait dû, pour quelque raison d’État, céder sa place à un autre, que le gouvernement ne joue ici qu’un rôle d’intermédiaire, qu’il intervienne seulement pour passer d’office le contrat entre deux intéressés, qui, mis en présence, n’arriveraient pas à s’entendre, — en ce cas, c’est le propriétaire primitif qui devra profiter du produit de la concession, si elle est faite à prix d’argent, de son abandon si l’on y renonce. Et puisqu’on admet qu’elle peut être retirée au concessionnaire indigne, il faut, à ce compte, que la mine fasse retour à la