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nous nous reprocherions d’avoir signalé ici les côtés défectueux de notre loi organique, si la situation des concessionnaires pouvait en être un instant ébranlée, s’ils n’avaient été les premiers, presque les seuls, à souffrir de ces inconvéniens dont ils ne songent plus à se plaindre. Mais il nous semble que de remettre en lumière les bases essentielles de la législation minérale, aura mieux servi leur cause que tous les argumens de circonstance. En restituant à la concession son caractère véritable, on dissipe les préjugés qui la discréditent ; en montrant qu’elle procède de la propriété foncière par la vertu d’une transmission légale consommée sous le contrôle du gouvernement, on la justifie dans son principe ; en la rattachant au droit commun, on la met à l’abri du bon plaisir. Au surplus, et dans tout autre système, — avec le droit régalien comme sous le régime de l’invention, — la position des propriétaires actuels de mines reste inattaquable. Aux revendications de l’État, ils opposeraient leur titre de propriété perpétuelle, contre-signé du chef de l’État ; si c’est l’inventeur qui l’emporte dans la loi nouvelle, ils peuvent, à l’encontre de tous autres, se réclamer de cette qualité, car le véritable inventeur d’une mine n’est pas celui qui en signale l’existence, mais celui qui la poursuit et l’atteint dans les profondeurs du sol, celui qui la découvre au sens littéral du mot. Forts de leur droit, de leur longue possession, des capitaux engagés, des résultats obtenus, appuyés sur les nombreux intérêts solidaires des leurs, les remaniemens projetés ne sauraient les toucher, sans compromettre du même coup la propriété foncière et l’industrie nationale.

La commission parlementaire, saisie du projet de loi sur les mines, l’avait parfaitement compris. En adhérant, pour l’avenir, à la doctrine nouvelle de la mine à l’inventeur, elle avait jugé nécessaire de rassurer les concessionnaires, en leur conférant expressément une nouvelle investiture, en affirmant la perpétuité de la propriété souterraine, en repoussant le système de redevances progressives destiné à amener la réduction des périmètres. Si elle n’a pas proposé la suppression de la déchéance, — comme la logique l’aurait voulu peut-être, — elle demandait du moins que cette mesure fût restreinte au cas, — presque équivalent à l’abandon volontaire, — où l’exploitation est interrompue pendant deux ans, sans cause légitime, les tribunaux civils étant juges des motifs. Il y a loin de là aux bouleversemens réclamés, en 1882 et 1884, par une fraction de la chambre. La réflexion et l’étude ont donc porté leurs fruits. On peut être assuré qu’en cette matière elles conduiront toujours vers les solutions simples et libérales.


RENE DE RECY.