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Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 100.djvu/145

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république, de la place qu’il occupait, au centre de l’assistance, pouvait voir, à sa droite, la mer étinceler des rayons du soleil couchant, et, à sa gauche, se dresser le pic Saint-Loup et les premières montagnes des Cévennes. Ajoutons que l’assemblée formait elle-même un très agréable spectacle. Les habits noirs, ce fléau des cérémonies officielles, y étaient rares. A côté de l’uniforme des officiers, des administrateurs, des magistrats, on y voyait à peu près tous les costumes universitaires du monde, des toques de toutes les façons, des robes de toutes les couleurs. Quoique la température fût brûlante, la brise de mer rafraîchissait l’atmosphère, en sorte qu’après les fatigues de la journée la séance solennelle semblait être un véritable repos. On a eu soin pourtant de ne pas mettre la patience de l’auditoire à une trop rude épreuve. L’exemple de Bologne avait porté ses fruits ; on se souvenait de cette mortelle séance de six heures, dans la cour de l’archiginnasio, sous un ciel de feu, où l’on avait entendu sans désemparer vingt-six discours en toutes langues. L’université de Montpellier fut beaucoup plus discrète. L’orateur qu’elle avait chargé de résumer son histoire, M. Maurice Croiset, se contenta d’en présenter les grandes lignes, et le fit avec infiniment de tact et d’esprit. Après quelques mots du recteur, et un discours important du ministre de l’instruction publique, le délégué de Bologne, M. Gaudenzi, prit la parole au nom des universités étrangères ; puis, on entendit le représentant de l’Institut et celui des facultés françaises ; enfin les étudians de tous les pays vinrent incliner leurs bannières devant le président de la république, et tout fut fini. La cérémonie n’avait pas duré tout à fait deux heures.

Je viens de parler des étudians, ils ont été, comme à Bologne, la joie de la fête. La foule ne se lassait pas de regarder ceux d’Oxford ou de Cambridge, avec leur grande mante noire et leur petit bonnet carré, ceux de Berne ou de Zurich, avec leurs bottes molles, leurs pantalons blancs, leurs jaquettes de velours, leurs longues écharpes multicolores. A chaque costume nouveau, c’était un réveil de curiosité et d’applaudissemens ; mais on était surtout ravi de voir quelle franche cordialité régnait entre ces jeunes gens, qui s’entendaient par le cœur plus encore que par le langage. On sait que ces sociétés d’étudians, si fréquentes à l’étranger, sont une nouveauté pour nous ; il y a quelques années à peine qu’elles commencent à se fonder autour de nos facultés. C’est le signe évident du réveil de l’esprit universitaire : l’union des maîtres, qui constitue véritablement l’université, se complète par celle des élèves. La preuve que ces associations répondent à un besoin réel, qu’à peine nées elles ne manquent pas d’importance, et qu’on leur croit de l’avenir, c’est qu’elles ont déjà leurs