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qui se trouvaient dans les rues du Caire, furent attaqués, plusieurs furent assassinés. Ceux qui purent s’échapper et gagner leur quartier donnèrent l’alarme.

Cinq coups de canon tirés du quartier-général, signal d’alarme convenu, annoncèrent l’insurrection.

À ce signal, on battit la générale. Tous les postes isolés rentrèrent et partout on se mit en défense. Les révoltés se jetèrent d’abord sur la maison du général du génie Caffarelli. Cette maison était le dépôt du génie ; il ne s’y trouvait que quelques officiers et quelques sapeurs. Ils furent surpris et massacrés. Le général Dupuis, qui était le colonel de la 32e à notre arrivée en Égypte, commandait la place du Caire. Dans l’espoir de rétablir l’ordre, il se rendit, accompagné d’un piquet de dragons et de quelques Turcs d’ordonnance, au milieu des insurgés. Il leur parlait et l’on commençait à l’écouter, quand un furieux fendit la tête d’une ordonnance turque. Ce fut le signal d’une échauffourée dans laquelle un adjudant commandant fut blessé et le général Dupuis transpercé d’un coup de lance dont il mourut presque aussitôt. Les troupes sortirent, et bientôt la fusillade s’engagea dans les rues. Plusieurs Français furent tués des terrasses, mais l’émeute fut sévèrement réprimée. Attaqués de toutes parts, les insurgés se réfugièrent dans la mosquée d’Éléazar, dite la grande mosquée, et s’y barricadèrent.

A deux heures de l’après-midi, le général Bonaparte ordonna de jeter des bombes, de la citadelle, dans le quartier des révoltés. Elles réussirent très bien. Après ce bombardement, une attaque fut exécutée contre la grande mosquée. L’on y rencontra une vive résistance, cependant l’on y pénétra, et l’on y fit un grand carnage. Les révoltés des autres quartiers demandèrent grâce. Elle leur fut accordée, mais comme la préméditation avait été établie, on rechercha les chefs de la révolte ; ceux que l’on put découvrir furent arrêtés et fusillés impitoyablement.

Nous demeurâmes convaincus que, seule, la terreur pouvait nous maintenir dans un pays où nous étions en petit nombre, et dont tous les habitans étaient, par fanatisme religieux, nos irréconciliables ennemis.

On s’occupa aussitôt de construire, autour du Caire, des fortins, pour tenir en respect cette ville populeuse et pour nous permettre de concentrer des feux d’artillerie, au besoin, sur tous les points.

Le 10 janvier 1799, mon bataillon partit, sous la conduite du général (tampon, pour aller dans la Haute-Égypte lever la contribution du Miry, impôt foncier perçu par l’ancien gouvernement. Nous partîmes avec une pièce de canon et un détachement de