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d’avoir des imperfections. Il a pu être trompé par des apparences ; quelques-uns de ses agens ont pu mal le servir ; ajoutons, si l’on veut, que des complaisances ont pu faire fléchir des règles qui auraient dû être inflexibles. Le fait brutal est que des prêts, ici ou là, ont mal tourné, surtout dans les départemens, parmi les propriétés rurales. La grêle, les élémens, le phylloxéra, une mauvaise administration, tout s’en est mêlé. Des emprunteurs sont restés un an, puis deux ans, sans payer l’annuité due. Le Crédit foncier a patienté quelque temps. Enfin, contraint d’agir, il a usé de ses privilèges extraordinaires, exproprié, vendu, et en l’absence d’acquéreurs, il a acquis lui-même. Il possède un domaine, et il l’exploite, l’améliore pour le revendre. Ce domaine se compose d’un grand nombre de propriétés diverses, sur lesquelles existaient des créances du Crédit foncier pour un montant total de 28 millions au moment de l’acquisition. Le tout a été acquis pour une douzaine de millions, et les améliorations successives ont absorbé 6 millions, ce qui porte à 18 millions le prix de revient de ce domaine immobilier. Mais déjà sa valeur vénale s’est élevée ; au 31 décembre 1889, elle était évaluée à 22 millions. Il n’y avait plus qu’un écart de 6 millions entre ce prix et celui de la créance primitive. Or ce découvert a pour contrepartie des réserves spéciales atteignant environ 10 millions. Tel est le déchet que vingt-huit ans d’activité, l’absorption du Crédit agricole et de la Banque hypothécaire, et un ensemble de créances de 2 milliards, ont produit dans le gage immobilier.

Nous allions oublier de dire que ce domaine n’est pas improductif. Le produit net, en 1889, a été de 447,000 francs, soit presque 2 1/2 pour 100 sur le prix de revient de 18 millions.

La dette-obligations du Crédit foncier a pour première garantie le gage hypothécaire dont nous venons de montrer l’indiscutable solidité. Elle a pour garantie subsidiaire le capital social et les réserves. On a vu les phases successives du montant du capital, depuis le modeste chiffre de 60,000 actions, atteint dès la première année de la création, jusqu’à celui de 341,000, auquel il est actuellement fixé. Les réserves ont eu également des destinées fort agitées. Elles apparaîtraient bien plus fortes aujourd’hui si, comme il a été rappelé plus haut, une bonne partie des millions accumulés des exercices antérieurs ou provenant de bénéfices exceptionnels (comme ceux des valeurs égyptiennes), ou apportés par les actionnaires des établissemens fusionnés, n’avaient été affectés à la libération intégrale des actions.

En dehors des réserves doit être considéré un très gros chiffre, 100,759,167 francs, dénommé « provision pour l’amortissement des emprunts. » C’est donc un fonds qui appartient absolument à