Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 101.djvu/700

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Rigal sur Alexandre Hardy et le Théâtre français au commencement du XVIIe siècle est de faire une lumière nouvelle sur l’un des momens les plus intéressans de cette évolution.

Et je suis bien aise que ce livre ne soit pas mauvais; qu’il soit même bon, quoique gros ; car autrement, puisqu’il a commencé par être une thèse de Sorbonne, je n’aurais pu m’empêcher de faire timidement observer que peut-être s’occupe-t-on beaucoup de théâtre, en Sorbonne, depuis quelques années. En effet, de trois thèses que nous voyons paraître, il y en a quasi régulièrement deux qui roulent sur le théâtre; et je sais tel professeur de « poésie française » qui parle toute une année du théâtre de Scribe ou de celui de Labiche, d’Adrienne Lecouvreur ou du Chapeau de paille d’Italie. Sans doute, c’est pour repousser, ou pour éloigner de lui par avance l’accusation de pédantisme, qui est celle dont tous nos professeurs, petits ou grands, jeunes ou vieux, semblent avoir aujourd’hui le plus de peur. Ils veulent enseigner en riant, et ils font jusqu’à de la linguistique ou de l’épigraphie « en hommes du monde. » Mais pour cette fureur de théâtre, le moindre inconvénient que j’y trouve, c’est de réduire insensiblement toute l’histoire de la littérature à celle du théâtre, laquelle en fait sans doute une partie, mais une partie moins considérable, moins importante, moins littéraire qu’on ne le croit. Songe-t-on assez qu’une tragédie : Zaïre; cinq ou six comédies de Marivaux; et le Barbier de Séville avec le Mariage de Figaro, voilà tout ce qui survit du théâtre du XVIIIe siècle! Ajoutons-y peut-être quelques opéras-comiques de Favart.


Le reste ne vaut pas l’honneur d’être nommé !


On l’a bien vu quand la Comédie-Française a essayé de ressusciter les Poinsinet et les Fagan. Ne sont-ce pas aussi de beaux sujets de thèse? Et là-bas, au fond de sa province, quelque jeune professeur n’y travaille-t-il point? C’est ce que j’attendrai pour reprendre ce thème; — et tout ce que je crains, c’est que l’on ne me fasse pas attendre assez longtemps.

Au moins cet Alexandre Hardy, dont M. Rigal vient d’étudier si consciencieusement la biographie et les œuvres, a-t-il pour lui de représenter toute une époque de l’histoire du théâtre français. Ecrivain détestable, mais dramaturge fécond, qui se vante lui-même quelque part de n’avoir pas écrit moins de cinq ou six cents pièces, ce qui semble beaucoup, on peut dire que Hardy, de 1600 jusqu’en 1630, a régné souverainement sur la scène. Nous ne trouverions guère à citer parmi ses contemporains qu’Antoine de Moncrestien, avec son Aman, sa Carthaginoise, ou son Écossaise, et, un peu plus tard, Théophile de