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Historia di Milano. Le sculpteur Antonio Pollajuolo travailla pour lui, de même que le médailleur Caradosso ; Bramante traça à sa demande le plan de la cathédrale de Pavie, la plus importante des fondations de ce prélat, qui, après avoir partagé les malheurs de son frère, mourut à Rome, où le magnifique mausolée d’Andréa Sansovino, à Sainte-Marie du Peuple, lui a assuré l’immortalité.

Quant aux représentans de l’aristocratie milanaise, les Borromeo, les Belgiojoso, les Pallavicini, les Melzi, les Sanseverino, c’est à peine s’ils se signalèrent de loin en loin par la construction de quelque palais, la commande d’un tableau de dévotion ou d’un mausolée. Seul le maréchal Jean-Jacques Trivulce (1447-1518) avait et le goût des entreprises grandioses, et le moyen de mettre ses projets à exécution. Mais, exilé de Milan pendant le gouvernement de Ludovic, il ne put donner un libre cours à sa magnificence qu’après la chute de son ennemi. Il chargea Léonard de préparer les plans et devis de son monument funéraire; mais rien ne nous autorise à croire que l’artiste ait poussé ses travaux au-delà de certaines études préparatoires. Un petit bronze de la collection Thiers, au musée du Louvre, une statuette de cavalier (sans le cheval) reproduit peut-être le souvenir d’un de ces essais. Un mot encore sur les Melzi; ils furent pour Léonard des amis plutôt que des protecteurs. L’un d’eux, le jeune François, se plaça sous la discipline de l’illustre artiste et le suivit à Amboise, où il lui tint fidèlement compagnie jusqu’à sa mort.

Ce concours, cette collaboration, qu’il évitait de demander aux seigneurs de son entourage, Ludovic les trouva, en revanche, au suprême degré dans son épouse, l’ambitieuse et énergique Béatrix d’Este, fille du duc Hercule de Ferrare. Dès 1480, alors que cette princesse ne comptait que cinq ans, il s’était fiancé avec elle : il conclut enfin le mariage en 1491, et six ou sept ans durant, jusqu’en 1497, date de la mort de Béatrix, aucun nuage ne semble avoir troublé le bonheur des deux époux. Malgré son extrême jeunesse, Béatrix ne tarda pas à imprimer une direction plus hardie à la politique de Ludovic : on attribue à ses conseils l’emprisonnement de plus en plus rigoureux du malheureux Jean-Galéas Sforza. Sa vanité de femme fit le reste. Ne négligeant pas une occasion d’humilier sa nièce, Isabelle d’Aragon, la souveraine légitime du Milanais, elle finit par provoquer une explosion qui faillit lui coûter le trône. On sait comment les doléances d’Isabelle décidèrent son père, le roi de Naples, à menacer le More, et comment celui-ci, pour se sauvegarder, décida Charles VIII à descendre en Italie. Tout, cette fois-ci, tourna bien pour Béatrix et son époux : le poison, affirme-t-on, les débarrassa de Jean Galéas; leur alliance