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A New-York, la panique fut extrême, d’énormes paquets de titres inondèrent le marché, les actions de plusieurs compagnies de chemins de fer subirent d’invraisemblables dépréciations. Aujourd’hui, le calme est rétabli d’un côté comme de l’autre de l’Océan-Atlantique. Les marchés ont été assainis par la violence même de l’ouragan. Les titres dépréciés sont passés des mains des spéculateurs abattus dans celles de financiers plus solides, on considère que la crise a traversé sa phase aiguë. D’ailleurs, la Banque de France a résolu de venir une fois de plus au secours du marché anglais. Dans sa séance du jeudi 13, le conseil de régence a donné son approbation à une proposition du gouverneur tendant à consentir à la Banque d’Angleterre un prêt de 75 millions de francs en or pour trois mois, à 3 1/2 pour 100 d’intérêt.

Au moment où se termine cette première quinzaine de novembre, les marchés financiers d’Europe semblent donc sur le point de voir se résoudre heureusement les difficultés de crédit qui ont pris, pendant quelques jours, un caractère si alarmant. Sur plusieurs des grands fonds d’état, la spéculation n’a même pas attendu cette heure de détente générale pour commencer le mouvement de hausse qui prépare et annonce d’importantes opérations. La rente française, tout d’abord, a été relevée de 94.30, cours de compensation, à 95 francs, même à 95.20. Pendant le mois d’octobre, qui a été une période de réaction et de tassement, les ventes d’inscriptions de portefeuille provoquées par les hauts cours et les besoins de fin d’année ont trouvé leur contre-partie immédiate dans les achats de la Caisse des dépôts et consignations pour le compte des caisses d’épargne. Ces achats se sont élevés à 35 millions, dépassant la moyenne mensuelle des trois premiers trimestres de l’année, qui avait été de 30 millions. Le rendement des impôts continue à présenter d’importantes plus-values qui promettent, pour l’exercice 1890, un excédent de recettes de 50 à 60 millions. La discussion du budget est menée rapidement, sans incident notable, et l’emprunt de 700 millions, si longtemps retardé, sera voté dans quelques jours.

Depuis plusieurs mois, le 4 pour 100 russe 1880 se tenait à 99 francs, arrêté devant le pair de 100 francs, dont ne le séparait plus qu’une unité. Cette courte distance a été franchie dans la dernière semaine, et le cours de 100 francs a été inscrit. Mais il ne l’a été que pour un ou deux jours, un coupon semestriel étant arrivé le 13 courant à échéance, ce qui a ramené le prix du titre à 98.40. La Banque de Paris, de concert avec un certain nombre de maisons et de banques de Berlin et de Saint-Pétersbourg, a conclu avec le ministre des finances de Russie un contrat pour l’émission d’un emprunt de 100 millions de roubles en titres 3 pour 100, destiné à la conversion d’obligations de chemins de fer 5 pour 100. L’opération aura lieu probablement dans les premiers jours de décembre.