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popularité, par un calcul électoral. Il en résulte qu’on ne sait pas même encore ce que ces lois coûteront, que dans tous les cas elles sont destinées à peser sur les budgets en préparant de nouveaux et inévitables déficits.

On a pallié, tant qu’on l’a pu, ce mal du désordre financier. Il faut bien cependant arriver à la vérité, et après avoir protesté devant le pays aux élections dernières contre les prétendues calomnies de ceux qui accusaient les républicains de préparer de nouveaux emprunts, de nouveaux impôts, on en vient à avouer assez piteusement qu’on sera obligé d’accroître encore la dette, de recourir à des taxes nouvelles ! C’est le dernier mot de cette politique des dix dernières années, qu’on s’efforce vainement de défendre. S’il y a au contraire une chose évidente, c’est qu’il y a beaucoup à désavouer de cette politique, c’est qu’il n’est que temps de chercher d’autres moyens de rendre à la France des finances mieux garanties, une paix morale mieux respectée, un gouvernement assez sérieux pour ne pas se laisser surprendre ou déconcerter par tous les genres d’imprévu.

S’il faut en croire les augures et les apparences, il y aurait donc encore des jours de paix pour l’Europe. A part des incidens comme cette querelle un instant survenue entre l’Angleterre et le Portugal, pour des territoires africains, à part l’imprévu, qui reste toujours réservé, tout serait au calme et au repos sur le continent. La paix, qui n’a pas cessé d’être dans le vœu des peuples, semble être aussi, plus que jamais, dans les dispositions des gouvernemens. Depuis les complimens des premiers jours de l’année, rien du moins n’a laissé entrevoir un trouble à demi sérieux, une tension ou une aggravation dans les rapports généraux. On semblerait, au contraire, affecter, dans certaines sphères, de n’avoir que de bonnes paroles, et le discours un peu vibrant que le jeune empereur Guillaume II a récemment adressé à ses gardes du corps, en leur remettant un nouveau drapeau, ne peut pas passer pour un appel de guerre ; ce n’est qu’un discours de circonstance et de cérémonie soldatesque. Il est entendu, sans doute, d’un bout de l’Europe à l’autre, qu’on est toujours sous les armes, qu’on doit s’occuper, sans trêve ni repos, de former des régimens, de découvrir quelque poudre nouvelle, quelque nouveau moyen de destruction et de cuirasser les forteresses ; c’est convenu ! Sauf cela, tout le monde est à ses affaires : la France à ses tracas de partis et de parlement, l’Allemagne à ses élections de demain, l’Autriche à ses compromis d’hier entre ses nationalités ennemies, la Russie à sa réserve silencieuse et énigmatique, l’Italie à ses difficultés financières et à ses expéditions en Abyssinie, à la recherche du roi Ménélick.

C’est la première fois depuis le nouveau règne que des élections vont se faire en Allemagne, et, sans décider de la politique de l’empire, le scrutin qui va s’ouvrir le 20 février a certainement son importance. Il y a