au nom de l’État, on aurait eu ainsi des caisses de retraite administrées par des syndicats professionnels réunissant les ouvriers de la même profession comme pour l’assurance contre les accidens. Ces syndicats fonctionnent à la satisfaction des intéressés, depuis plusieurs années déjà, sans rien coûter à l’Etat, sans ingérence importune des autorités publiques. L’Etat n’accordant pas de subvention et n’étant pas chargé du service des rentes, les assurés ne pouvaient pas lui réclamer des pensions plus élevées, avec des subventions plus larges. Les agitateurs socialistes ne se trouvaient pas en mesure de faire leur plate-forme électorale de l’augmentation des rentes aux frais de l’empire, comme le projet du gouvernement, adopté par la majorité du Reichstag, va le leur permettre désormais, en entraînant par l’appât de leurs promesses des millions et des millions de gens, tous intéressés à grossir le montant des rentes en expectative. En vérité, l’aveuglement des gouvernans, qui ont attribué à l’Etat l’obligation de servir des rentes et d’assurer les moyens d’existence de tous les travailleurs invalides, est incompréhensible pour les esprits réfléchis.
Ni la fusion des caisses de retraite avec les caisses de malades, ni leur gestion par les syndicats professionnels pour l’assurance contre les accidens, n’ont trouvé l’assentiment du gouvernement. En présentant au Reichstag le projet officiel, adopté en définitive sans modification considérable, le ministre d’état, M. de Boetticher, a bien déclaré accepter volontiers toute organisation reconnue meilleure que les offices administrés par l’État. A la même séance du Reichstag, le 6 décembre 1888, le représentant du chancelier de l’empire a affirmé les préférences, ou tout au moins le penchant du ministère prussien pour l’organisation syndicale. Mais le 29 mars 1889, à trois mois d’intervalle, M. de Boetticher reparut au banc des ministres pour dire que, si le Reichstag chargeait les syndicats professionnels ou les corporations d’assurance contre les accidens du service des rentes aux invalides, limitées aux personnes soumises à l’assurance obligatoire, en vertu de la loi du 6 juillet 1884, le conseil fédéral repousserait cette décision. Or, le conseil fédéral, tout entier à la dévotion du chancelier, adhère à ses ordres avec une soumission complète pour toutes les affaires d’importance. Comme raison de l’exclusion des syndicats professionnels, M. de Boetticher alléguait l’impossibilité de traiter différemment les ouvriers allemands pour les pensions de retraite : un traitement différentiel deviendrait une source de mécontentement, susceptible de provoquer la révolution sociale, que la loi actuelle doit empêcher. Par suite des déplacemens continus amenés par la liberté de domicile, les ouvriers d’aujourd’hui changent souvent de résidence et d’occupation. En passant d’une profession où