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habitude, sont d’ordres divers, depuis le second jusqu’au dernier, et au-delà. Mlle Eames a gentiment chanté le rôle de Colombe ; elle y est ingénue et dit d’une voix très pure sa ballade sans accompagnement. Mme Bosman fait de son mieux dans un rôle qu’on a dénaturé pour elle. Le personnage de Scozzone perd, à cette transposition, l’ampleur, l’étoffe que lui aurait donnée le timbre du mezzo-soprano ou du contralto. M. Saint-Saëns le savait peut-être ; il savait aussi que trois soprani produiraient un ensemble trop mince et trop aigu, et ce n’est pas à sa requête, sans doute, que pour monter un ouvrage comportant un mezzo-soprano, on a attendu le départ de Mlle Richard. Ah ! si elle revenait, Mlle Richard ! Si sa rentrée à Covent-Garden, annoncée pour le printemps, lui donnait la nostalgie du théâtre, ce théâtre fût-il l’Opéra ! On lui rendrait le rôle de Scozzone ; peut-être se déciderait-on enfin à représenter, avec elle et M. Jean de Reszké, Samson et Dalila, le chef-d’œuvre de M. Saint-Saëns. On le donne en ce moment à Rouen, et pas trop mal, ma foi, ce Samson, encore plus puissant qu’Ascanio n’est aimable… Mais non ! Mlle Richard ne reviendra pas ; MM. de Reszké s’en iront, et il nous restera M. Cossira et Mme Adiny. Je m’aperçois que je n’ai pas parlé d’eux, ni de M. Plançon. Pour M. Plançon, j’ai eu tort : il fait des progrès et n’a pas mal chanté du tout François Ier. Quant aux autres, hélas ! hélas ! Mais puisque de ce faible ténor et de cette forte chanteuse je n’ai rien dit, je ne m’en dédis pas.


CAMILLE BELLAIGUE