Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 99.djvu/106

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

grandir ou diminuer sa part d’influence avec le poids de ses charges, si le statut, échelonnant les degrés de l’autorité d’après l’échelonnement des cotes, attribue peu de voix à ceux qui paient moins que leur quote-part dans les frais et reçoivent une aumône, beaucoup de voix à ceux qui donnent une aumône et paient plus que leur quote-part dans les frais.


XI

Telle est la règle en toute association d’intérêts, même dans ces compagnies d’actionnaires où la répartition des charges ne comporte, pour aucun actionnaire, aucune faveur ni défaveur. Notez que, dans ces sociétés, la coopération n’est point forcée, mais volontaire ; les associés n’y sont pas, comme dans la société locale, des conscrits enrôlés par la contrainte d’une solidarité physique, mais des souscripteurs engagés par la seule impulsion de leur préférence réfléchie, et chacun d’eux y reste comme il y est entré, de son plein gré ; pour en sortir, il n’aurait qu’à vendre ses actions ; par cela seul qu’il les garde, il confirme sa souscription, et incessamment, par une acceptation quotidienne, il signe à nouveau le statut. Ainsi, voilà une association parfaitement libre ; elle est donc parfaitement équitable, et son statut doit servir de modèle aux autres. — Or ce statut distingue toujours entre les petits et les gros actionnaires ; toujours il attribue une plus grande part d’autorité et d’influence à ceux qui ont une plus grande part dans les risques et les frais ; en principe, il proportionne le nombre des voix qu’il confère à chaque membre au nombre des actions dont ce membre est propriétaire ou porteur. — A plus forte raison doit-on inscrire ce principe dans le statut d’une société qui, comme la société locale, diminue par ses dégrèvemens la charge du petit contribuable, et augmente par ses surtaxes la charge du contribuable gros ou moyen ; quand la nomination des gérans y est livrée au suffrage universel compté par têtes, les gros et moyens contribuables y sont fraudés de leur dû et dépouillés de leur droit, dépouillés plus à fond et lésés plus à vif que le porteur ou propriétaire de mille actions dans une entreprise d’omnibus ou d’éclairage si, quand il vote dans l’assemblée générale des actionnaires, il n’avait pas plus de voix que le propriétaire ou porteur d’une seule action. — Qu’est-ce donc, lorsque la société locale adjoint. à son objet naturel et inévitable un objet facultatif et supplémentaire ; quand, par surcroît, elle entreprend de défrayer l’assistance publique et l’éducation primaire ; quand, pour ces frais additionnels, elle multiplie les centimes additionnels ; quand le gros ou moyen contribuable paie seul ou presque seul pour cette œuvre de bienfaisance dont il ne