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Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 99.djvu/623

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LA
PRONONCIATION DU GREC


I

Peu de nations ont été aussi éprouvées par le sort que la nation hellène. Après avoir subi l’invasion des Perses, qu’elle repoussa victorieusement, elle passa sous le joug macédonien. Alexandre la conduisit à la conquête de l’Asie ; mais Persépolis brûla, comme Moscou ; l’empire se mit en lambeaux et ne fut plus en état de résister aux légions romaines. Cependant, par l’action puissante du christianisme, les Grecs reprirent une unité qui se concentra dans Constantinople et jouèrent pendant plusieurs siècles un rôle prépondérant dans le monde, à une époque où les peuples occidentaux ne faisaient encore que s’organiser. Il y eut un moment où le budget de l’empire byzantin atteignait trois milliards, sans que les populations parussent trop surchargées. Mais le monde chrétien était partagé en deux églises ennemies ; car si les religions réunissent les hommes de même croyance, elles divisent et mettent aux prises les communautés entre elles. La présence des musulmans sur la Terre-Sainte et la délivrance du tombeau du Christ furent un prétexte pour les croisades, expéditions qui ne furent pas moins funestes aux chrétiens d’Orient qu’aux mahométans. Après ces expéditions réitérées et la création éphémère d’un empire latin à Constantinople, les Hellènes étaient épuisés et hors d’état de repousser l’ennemi, qui s’avançait progressivement depuis huit siècles. L’événement de 1453 parut être ce dernier coup qui donne la mort ; les Grecs semblèrent effacés pour toujours de l’histoire.