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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 104.djvu/366

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directement de rhétorique, 93 avaient passé par l’enseignement spécial et 1,265 par les mathématiques préparatoires. Dans la classe préparatoire à Saint-Cyr, on comptait 859 élèves, dont 207 avaient fait leur philosophie; 52 venaient de rhétorique, 110 de l’enseignement spécial, 479 de la classe de mathématiques préparatoires. Les proportions relatives, parmi les élèves de Paris, étaient à peu près les mêmes.

On voit par ces chiffres que la grande majorité des élèves qui veulent concourir pour les écoles du gouvernement échappent, vers la fin de leurs études, aux cadres de l’enseignement classique actuel, aussi bien qu’à ceux de ce futur enseignement français, et on aperçoit en même temps combien sont complexes les problèmes de l’enseignement secondaire et combien serait téméraire la prétention de résoudre à la fois par une formule unique, telle que celle d’un enseignement classique purement français, des questions aussi différentes que le problème d’une culture littéraire moderne, supposée équivalente à la culture fondée sur les langues anciennes ; le problème d’une culture scientifique élevée, réclamée par un grand nombre de vocations ; le problème d’une culture plus courte et plus pratique, exigée par les nombreux enfans qui quittent nos collèges vers l’âge de quatorze ans; enfin le problème particulièrement impérieux de la préparation aux concours des grandes écoles scientifiques.

Il n’est pas possible aujourd’hui, tous les hommes compétens le reconnaissent, de concilier des destinations aussi diverses et de faire rentrer, de gré ou de force, l’enseignement secondaire dans un cadre unique, celui de l’éducation intégrale, comme on dit quelquefois; éducation dans laquelle les enfans seraient préparés, par un enseignement encyclopédique, à l’ensemble des carrières. C’est cependant cette unité idéale de l’enseignement secondaire que prétendraient maintenir les partisans absolus de la vieille éducation classique, fondée sur les humanités grecques et latines. Les partisans absolus et exclusifs d’une éducation dite moderne, et qui serait fondée uniquement sur l’étude du français et des langues vivantes, maintiennent de leur côté la même prétention. Seulement, en présence de la nécessité sociale qui réclame des connaissances chaque jour plus nombreuses et plus approfondies, les partisans exclusifs de l’enseignement moderne veulent leur faire place en supprimant dans l’ensemble général des études le grec et le latin ; sauf pour une minorité, pour laquelle on conserverait provisoirement le vieux type classique, réclamé par quelques familles, en attendant qu’il tombe de lui-même en décadence.

Dans un système comme dans l’autre, on proteste contre une spécialisation anticipée, et on invoque la nécessité de ne pas préjuger