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l’entretien des fantaisies des générations passées ; il osait ajouter à cette nomenclature de dépenses stériles celle des prisons d’État, « que le roi désavouerait, s’il en connaissait l’inutilité et le danger.» Il s’attaquait aux abus des pensions et des gratifications qui ne récompensaient pas les services ou qui n’encourageaient pas les talens ; il demandait que les comptes des départemens ministériels, excepté celui des affaires étrangères, fussent communiqués tous les ans en imprimés.

Il ne dissimulait pas la vérité quand il ajoutait : « Quel que soit l’amour des peuples pour la personne de sa majesté, il serait dangereux de croire que leurs ressources sont inépuisables; elles ne sont même que trop épuisées, et, pour ne citer que la province à laquelle j’appartiens, qui souffre particulièrement de l’inégalité de l’impôt et de l’inattention du gouvernement, j’ose assurer le roi que, dès à présent, ses cultivateurs abandonnent leurs charrues ses artisans leurs ateliers, que ses plus industrieux citoyens, dépouillés de ce qu’ils gagnent chez eux et de ce qu’ils rapportent des autres pays, n’ont bientôt plus d’autre alternative que la mendicité et l’émigration, et que, dans cette partie du royaume, il ne peut augmenter les charges du peuple sans le réduire à toutes les extrémités de la misère et du désespoir. »

Après avoir insisté sur ce principe, que la réduction de la dépense devait précéder l’augmentation de la recette et que, s’il était nécessaire de combler le déficit par l’impôt, ce ne devait être qu’après avoir épuisé toutes les ressources possibles de bonification et de retranchemens, La Fayette constatait que l’administration de M. de Brienne assurait une économie de 40 millions. Il dénonçait au roi les loteries, « ce jeu coupable dont le gouvernement était le banquier, » la marque des cuirs, qui avait perdu les tanneries du royaume, enfin la taille, impôt inégal, arbitraire et ruineux, et il terminait ses observations par ces paroles qui eurent un grand retentissement : « Si le peuple des campagnes ne compte aucun de ses membres dans cette assemblée, nous devons au moins lui prouver qu’il n’a pas manqué d’amis et de défenseurs... Dans tous les cas, les travaux de l’assemblée, la salutaire influence des assemblées provinciales, les talens et les vertus de l’administration actuelle, doivent amener un nouvel ordre de choses dont l’énumération pourrait être contenue dans un mémoire particulier que je propose de présenter à sa majesté. Comme le crédit doit être transporté sur des bases plus naturelles, que la baisse de l’intérêt de l’argent peut diminuer celui de la dette publique, dans le rapport de 9 à 4, comme la simplification de perception doit délivrer l’état des compagnies de finances, dont les engagemens