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destination ou en provenance de Paris, que l’on tirera des améliorations actuelles tout le parti qu’elles comportent.

Néanmoins, le fret a déjà sensiblement baissé. De 17 francs en 1850, il est descendu successivement à 10 ou 12 francs en 1859, à 8 francs ou 9 francs dix ans plus tard ; il était, en 1888, de 4 francs à 5 francs à la remonte et de 2 fr. 75 à 3 fr. 50 à la descente. Il a encore légèrement baissé depuis. Comme terme de comparaison, nous devons dire qu’ailleurs, sur les canaux du Nord, par exemple, le fret n’a pas varié d’une façon sensible depuis fort longtemps. La diminution constatée sur la Seine est donc un fait particulier, dû à l’économie que les récentes améliorations permettent de réaliser sur les transports.

Le tonnage a, en même temps, considérablement augmenté. Il est passé de 228 millions de tonnes-kilomètres en 1881, à 390 millions en 1888 et à 414 millions en 1889.

Ce trafic se développera encore à mesure que les dimensions des bateaux et l’organisation de la batellerie se seront mises en harmonie avec la situation nouvelle. Mais, si on éprouve quelque déception de ce côté, — ce qui est fort possible, — il faudra en chercher la raison dans les circonstances d’ordre général qui influent sur l’activité des transactions et non pas dans l’insuffisance de la voie, laquelle, sans exiger de nouveaux aménagemens, se prêterait aisément à un trafic décuple, peut-être, de celui d’aujourd’hui.


IV

Tel est donc l’état des choses sur la Seine au moment où l’idée de Paris port de mer vient de nouveau solliciter l’attention publique.

Le projet d’aujourd’hui n’est d’ailleurs pas celui d’hier, et ne sera sans doute pas celui de demain. Les vicissitudes de sa conception rappellent un peu celles qui ont signalé les projets d’autrefois : de Passement en 1700, de la Société Klachat en 1825. On rêve grand : la réalité se charge de couper les ailes à l’imagination, et de ce qu’on avait d’abord conçu à ce qu’on propose, le chemin va se rétrécissant de plus en plus.

En 1882, en effet, il avait été question d’un véritable canal maritime, sans barrages, sans écluses, creusé dans le lit même du fleuve, à une profondeur de 6m,20 en étiage et de 7m,50 en temps ordinaire. On promettait d’ailleurs d’accroître cette profondeur au fur et à mesure que les progrès de l’amélioration de la Seine maritime permettraient l’accès de plus grands navires. Ce canal, il