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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 104.djvu/877

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foudroya, durant les années 1868 et 1869, tant de vignobles provençaux et comtadins, sembla se ralentir à la suite du rude hiver de 1870, et un instant on put espérer que le mal ne s’étendrait pas outre mesure en dehors des foyers déjà ravagés. Les plantiers de Béziers, Capestang et ceux de la circonscription de Saint-Pons n’éprouvèrent de dommages sérieux qu’à partir de 1878. Déjà, à cette époque, le premier remède certain et efficace qu’on eût signalé combattait avec succès l’insecte sur ces mêmes bords du Rhône qui avaient été les témoins des désastres les plus anciens. M. Faucon, propriétaire au Mas de Fabre, près Tarascon, annonça, en effet, dans le courant de l’année 1869, qu’il était parvenu à sauver son vignoble en le soumettant à une submersion hivernale bien conduite.


II

Joignant le précepte à l’exemple, M. Faucon lui-même, à la suite de quelques essais, formula la règle à observer pour obtenir de bons résultats au moyen de l’inondation. Quel but faut-il atteindre ? Noyer le puceron, ou, pour parler plus scientifiquement, l’asphyxier par défaut d’air. Il faut donc opérer avec de l’eau aussi peu saturée d’air que possible et se méfier des pentes qui favorisent l’absorption du gaz par le liquide.

Le traitement pourrait, à la rigueur, être pratiqué durant l’été ou le printemps. Mais alors le vigneron risquerait de porter un coup funeste à la plante, en arrêtant la végétation, outre qu’il ne pourrait plus cultiver le sol à l’époque favorable. Bien pis, avec certains cépages rampans comme l’aramon, les raisins eux-mêmes tremperaient dans l’eau. Enfin, pendant les chaleurs, les canaux d’irrigation ne débitent plus qu’un cubage restreint, alors qu’en hiver ils coulent à pleins bords.

Il convient donc de s’y prendre en hiver ou du moins en automne, à la suite des vendanges, et après que les sarmens ont fini de s’aoûter. Le plan d’eau doit dominer le niveau du sol de deux décimètres au moins, et il y a tout avantage à distribuer plus généreusement le liquide de façon à mouiller les couronnes elles-mêmes des souches. L’insecte ayant la vie fort dure, il ne faut pas hésiter à prolonger la submersion. En abrégeant celle-ci, on risquerait de réaliser une expérience des plus dangereuses, et, le dommage, une fois produit par cette économie mal entendue, serait aussi coûteux à guérir que difficile à réparer. Le minimum indiqué est de quarante jours, durant lesquels l’eau ne doit pas descendre