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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 105.djvu/483

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préoccuper du déficit probable de la récolte chez nous et dans le reste de l’Europe.

Jamais les baissiers, qui depuis si longtemps attendaient leur tour, n’avaient eu en main un tel nombre d’atouts. Aussi les vit-on se mettre à l’œuvre avec une ardeur extraordinaire. A la fin de la semaine, les marchés de Londres et de Paris étaient en plein désarroi. Les places allemandes gardaient une attitude plus calme, mais cédaient peu à peu au courant. Les journées du 11 et du 12 ont achevé la déroute des haussiers sur toute la ligne.

Le 13 enfin la débâcle s’est arrêtée et des rachats du découvert vainqueur ont brusquement relevé les prix. Les cours de nos fonds publics, des rentes étrangères et d’un grand nombre de valeurs ne sont donc pas au plus bas au moment où nous écrivons, et on peut espérer une liquidation de quinzaine moins désastreuse que ne semblaient le présager les deux premières Bourses de cette semaine. Il n’en reste pas moins entre les cours du 13 et le niveau de la liquidation de fin avril des écarts en baisse d’une importance fâcheuse pour le marché.

La rente française 3 pour 100 a reculé chaque jour depuis 94.65 ; une chute brusque, le 12, a fait inscrire le cours de 92.20. Le lendemain, une vive reprise rétablissait celui de 92.90. L’emprunt perd deux unités à 91.10. L’écart de 1.80 entre les deux rentes a été mis à profit par la Banque de France, qui a effectué, pour un capital de quelques millions, un arbitrage de l’une à l’autre. L’amortissable suit pas à pas désormais les cours de la rente perpétuelle ; le 4 1/2 n’a reculé que d’environ 0 fr. 60.

Les ventes des baissiers ont précipité le Portugais 3 pour 100 de 52.25 à 37, le 4 1/2 de 385 à 270, le 4 pour 100 de 322 à 230. Ces derniers prix n’ont fait qu’une apparition fugitive à la cote. Les vendeurs, empressés de réaliser, ont provoqué, par leurs demandes, une amélioration rapide à 41, 320 et 265. Le Portugal subit une crise très intense de crédit. Son gouvernement, faible à l’intérieur, s’est engagé avec l’Angleterre dans un conflit dont il pourra difficilement sortir avec les honneurs de la guerre. La lutte est en tout cas désastreuse pour lui sur le terrain financier ; ses fonds sont capitalisés à 7 1/2 pour 100, ce qui les met exactement au même rang que l’emprunt de la République Argentine 5 pour 100 1886, le seul de ce pays dont le service d’intérêt ne soit pas encore interrompu.

L’Extérieure a baissé de 75.25 à 68 et s’est relevée à 70.25. Le trésor espagnol allait emprunter 250 millions et autoriser une extension illimitée des émissions de billets par la Banque d’Espagne. Tout emprunt est maintenant impossible, et les combinaisons préparées entre le trésor et la Banque d’Espagne vont se heurter à un obstacle des plus sérieux, l’élévation de la prime sur l’or. La crise portugaise a