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table, l’ouvrage du duc de Luynes et de Debacq, celui de François Lenormant, des photographies et des détails, pense-t-on que le public ne les examinerait pas avec profit et avec reconnaissance?

Depuis que M. Paulin a obtenu un véritable succès avec sa reconstitution animée des Thermes de Dioclétien dont il nous redonne encore cette année un morceau, une Piscine, ses successeurs à la villa Médicis accompagnent aussi presque toujours leurs dessins techniques de vues d’ensemble souvent très intéressantes et très suggestives. Ce n’est pas pour cela sans doute qu’on les envoie à Rome et en Grèce, et il ne faudrait pas qu’ils consacrassent tout leur temps à ces exercices de main et d’imagination, néanmoins, il n’y a point de mal à ce qu’ils sachent dire habilement ce qu’eux seuls peuvent bien dire, le charme ou la grandeur de l’architecture en place, de l’architecture expliquée et harmonisée par la lumière et par le milieu pour laquelle elle a dû être faite. Il n’y a pas d’art plus mêlé à la vie des choses et des êtres que l’architecture, mais si on ne la voyait que sur des épures et des plans, on ne s’en douterait guère; c’est peut-être parce que tant de constructions sont uniquement préparées dans l’atelier au lieu d’être conçues en plein air, qu’elles nous apparaissent, sur le terrain, si mortes, si sèches, si froides. Aussi prendrons-nous toujours bonne idée d’un architecte qui est en même temps, devant les édifices même, sous leur ciel, dans leur paysage, je ne dis pas un habile, mais un sincère aquarelliste. C’est la preuve qu’il sait voir, dans les constructions, en même temps que leurs profils, et leurs pleins et leurs vides, le rôle expressif qu’y joue la qualité de la matière dans l’accentuation de ces profils, les clartés, ombres, pénombres, reflets qui animent ces pleins et de ces vides, et le caractère particulier qui résulte pour un monument tant de ses colorations spéciales que du rapport de ces colorations avec le ciel, les verdures, les fabriques environnantes. Parmi un assez grand nombre de feuilles d’aquarelles d’après des édifices de siècles divers, qui montrent bien cette intelligence du milieu architectural, les plus jolies nous paraissent être celles de MM. Chesquier (Clochers et beffrois flamands), Chapelain de Caubeyres (Relevé et mosaïque du baptistère de Ravenne), George Pradelle (Baptistère de Saint-Marc et église basse de Saint-François à Assise) ; ce ne sont que des croquis de voyage, comme les croquis au crayon de M. Mayeux sur l’Architecture bretonne, mais ce sont des notes vives et sincères qui préparent les yeux à se fixer sur des études plus précises, forcément plus abstraites aussi, des monumens analysés dans leurs détails.

Pour en revenir à nos pensionnaires de Rome, leurs envois, cette