billets du trésor, ce qui n’est pas, après tout, si mal raisonner. De là le système des sub-treasuries, ou comptoirs de prêts publics.
Le développement si rapide de l’Alliance et des autres associations agricoles a été le résultat direct de l’application audacieuse faite, par le parti républicain, de la politique qui a inspiré le tarif Mac-Kinley et de la mollesse de la résistance opposée dans le congrès à cette politique par les représentans et les sénateurs démocrates, que gênaient les tendances protectionnistes d’une fraction du parti. L’insurrection des ouvriers de la terre contre la cherté de la vie s’en est prise, avant tout, au parti républicain, parce que ce parti est inféodé aux intérêts de tout ce qui représente, aux yeux des cultivateurs, une exploitation en règle organisée contre eux : les banques, les chemins de fer, les trusts, dirigés par des hommes disposant de la toute-puissance d’innombrables millions. Les démocrates ne vont assurément pas aussi loin que les fermiers dans leurs déclamations contre le capital et les monopoles, contre le Money Power, mais ils ont toujours été partisans, au moins dans leurs platforms, de méthodes économes et frugales dans la direction des affaires nationales, tandis que le parti républicain a élevé le gaspillage des deniers publics à la hauteur d’un dogme politique. L’administration de M. Cleveland avait légué, en 1888, à celle de M. Harrison, des finances prospères, trop prospères même, puisque l’excédent annuel des revenus fédéraux dépassait 500 millions de francs, et que la grande affaire de la présidence démocratique avait été la dénonciation des périls que faisait courir ce surplus et la recherche des moyens de le ramener à des proportions plus modestes par la réduction des taxes, et notamment des taxes douanières. Les républicains n’ont pas connu cet embarras. Décidés, avant tout, à ne pas laisser à leurs successeurs éventuels même la possibilité de réduire les revenus du tarif, ils ont résolu le problème de la façon la plus simple, en enflant démesurément les dépenses. Ils ont triplé le montant des pensions militaires, ce qui avait le double avantage de leur assurer aux élections les voix de milliers d’anciens soldats et d’absorber à peu près tout le surplus ; en sorte que le gouvernement fédéral va payer, en cette année 1891-1892, près de 800 millions de francs de pensions aux survivans des guerres de la république, y compris naturellement la guerre civile. Il est aisé de concevoir à quels énormes abus donne lieu cette prodigalité. C’est de la démence, mais de la démence voulue, calculée, et les républicains ont porté le même