Il y a dans cette dépréciation générale un élément factice qui en exagère les effets apparens. Déjà, à Lisbonne, la prime s’est étendue. La crise monétaire, qui s’est déclarée après l’insuccès de l’opération des Tabacs et à la veille du paiement du coupon semestriel de la dette, a surtout consisté en une insuffisance de numéraire. Le gouvernement et la Banque du Portugal y ont paré par la création de petites coupures de billets de banque. Le Portugais n’en a pas moins fléchi de 4 unités et demie, de 43 à 38 1/2, le marché anglais vendant sans cesse, tout en accusant Paris de grossir le découvert, et réciproquement. Une telle baisse tient suffisamment compte d’une gêne monétaire qui peut n’être que passagère.
L’Extérieure a reculé de 73 à 71, sur la seule crainte des embarras que devra susciter l’application de la nouvelle loi sur la circulation fiduciaire. Jusqu’à présent la Banque n’a pas encore étendu son émission de billets au-delà du montant de 750 millions de pesetas, ancienne limite légale.
Dans l’Amérique du Sud, tout va de mal en pis. Une recrudescence de crise s’est produite à Buenos-Ayres, et le krach a gagné l’Uruguay qui, jusqu’ici, avait essayé de sauver son crédit. L’Uruguay 1888 a été précipité de 53 à 45. Quant au 5 pour 100 argentin 1886, le seul fonds du pays sur lequel le service d’intérêt n’eût pas été interrompu, il a baissé de 325 à 265, soit de 65 à 53, c’est-à-dire de 12 pour 100. Le délégué du gouvernement argentin à Londres a engagé des négociations pour le règlement des fonds provinciaux. Ces derniers titres ont encore reculé du cours de 100 francs à celui de 80. Les fonds brésiliens ont été atteints par contre-coup et aussi à cause de la lourdeur du change. On tenait encore le 4 pour 100 à 73 au milieu du mois, il ne vaut plus que 70.
Les fonds italiens, hongrois et russes ne présentent point d’aussi fortes différences. La dépréciation sur ce groupe a été uniformément d’une unité. L’Italien a fléchi en une séance de 91 à 90 sur le bruit que le gouvernement du roi Humbert se préparait à lancer à Berlin un emprunt à obligations de chemins de fer, ce qui a été démenti. La spéculation a surtout redouté de nouvelles livraisons de titres. Le Hongrois a rétrogradé de 91 1/4 à 90 1/4, et les 4 0/0 russes de 97 à 96, sur des réalisations continues de la spéculation à Vienne et à Berlin. Le rouble, sur notre place, a reculé de 275 à 265 et à Berlin de 225 à 216. L’étai de la récolte des blés en Russie est toujours l’explication invoquée pour cette rapide dépréciation du papier russe.
Les fonds ottomans ont échappé, en partie, au courant de baisse. Le 1 pour 100 n’a cédé que quelques centimes, l’obligation Douanes a fléchi de 452.50 à 445, la Privilégiée est au même cours à 1 ou 2 francs près. La stabilité que l’entente franco-russe semble promettre à l’Europe orientale ne peut que favoriser la bonne tenue des fonds