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vigoureusement aux attaques, porte au besoin la lutte dans le camp de ses agresseurs. On se bat à coups de pamphlets ; d’anciens textes oubliés, presque altérés par la moisissure des âges, reparaissent au grand jour, copieusement commentés par la foule subtile des théologiens scolastiques. Mais ce ne sont là, pour le moment, que passes d’armes brillantes, et il s’écoulera du temps avant qu’on n’en vienne à des corps à corps meurtriers. Nous l’avons dit, si la situation du clergé national n’est pas sérieusement ébranlée en Angleterre, elle est beaucoup moins solide, chancelante même, dans la principauté de Galles, où l’immense majorité de la population est nettement anticonformiste. Obligé de subvenir aux besoins du culte dissident qu’il professe, le peuple proteste bruyamment contre la dîme et contre cette dure nécessité de pourvoir à l’entretien dispendieux d’un état-major isolé de recteurs et d’évêques. Depuis quelques années, le conflit est arrivé à l’état aigu, et, ce qui en rendra le règlement tôt ou tard inévitable, c’est que l’antagonisme n’est pas ne d’hier, qu’il dure depuis des siècles, et qu’à une époque de progrès et de liberté il faut bien que la liquidation se tasse et que les choses rentrent dans l’ordre. Les Gallois reprochent aux ministres du culte anglican d’avoir systématiquement méconnu leurs aspirations, abandonné leurs ancêtres au paganisme, persécuté les défenseurs de leurs intérêts spirituels. Ces violences passées, ils ne les regrettent pas, ils en parlent avec la fierté de gens qui, après les avoir bravées, en ont triomphé et puisent dans la grandeur même des périls qu’ils ont eu à vaincre les forces nécessaires pour continuer le combat. La moralité, la vertu, la tranquillité bien connues qui sont l’orgueil du pays de Galles et l’ornement de ses paisibles retraites, à qui les doit-on, si ce n’est à ces humbles méthodistes qui ont si heureusement dirigé la conscience et l’honnêteté instinctive de leurs adhérens? Comment se fait-il qu’à l’inverse de l’Angleterre, où la statistique criminelle fournit des chiffres si élevés, la session des assises galloises soit souvent close le jour même de son ouverture, faute de criminels à juger? C’est qu’en s’affranchissant du joug des religions imposées, les comtés recueillaient un bien plus précieux encore que la liberté. Ils revenaient à l’élévation native, à la simplicité de mœurs des temps passés, qualités remarquables qu’ils avaient lentement perdues au contact de maîtres arrogans et d’une conduite désordonnée, lorsqu’elle n’était pas simplement méprisable.

Rappelons les faits. L’église primitive du pays de Galles semble avoir pris naissance à l’époque de l’occupation romaine. Son indépendance disparut avec l’arrivée des conquérans de Normandie. Guillaume et ses successeurs avaient une politique arrêtée qu’ils entendaient faire prévaloir, coûte que coûte. Ils, voulaient annihiler