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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 107.djvu/669

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par les armes. Tandis que Championnet allait rallier ses autres divisions, Macdonald s’établit à Civita-Castellana ; il avait au plus 5 ou 6,000 hommes ; Mack vint l’attaquer avec 40,000. La position était bonne pour la défense ; les Napolitains échouèrent et s’enfuirent jusqu’à Rome, laissant leur camp tout tendu. Ce fut le commencement d’une série de succès : à Otricoli, où l’on trouva, rempli de cadavres odieusement mutilés, le dépôt des malades et des blessés français ; à Calvi, où 2,000 hommes en firent capituler 7,000. Cela fait par lui tout seul, Macdonald rejoignit le général en chef ; il le trouva singulièrement aigri. Dans sa correspondance, en rendant compte de ses opérations, si brillantes et heureuses qu’elles eussent été, au lieu d’emboucher la trompette, il avait pris plutôt le ton plaisant, « sans autre intention, disait-il, que de faire voir qu’il y avait bien peu de gloire à recueillir contre des ennemis si lâches et si vains quelques jours auparavant. » Or les jaloux avaient persuadé à Championnet que son lieutenant avait voulu se moquer de lui, et le dialogue s’engagea sous cette fausse impression : « Vous voulez me faire passer pour une f… bête. — Sur quelles preuves ? Comment ose-t-on m’imputer un manque d’égards et de respect à mon chef ? — Voici votre correspondance. » — « Je la lui expliquai, ajoute Macdonald ; il s’adoucit ; le général Éblé, commandant l’artillerie, avec lequel j’étais lié, entra, intervint, et nous fûmes raccommodés en apparence. »

On rentra victorieux à Rome dix-sept jours après en être sorti. Le soir même, un parlementaire napolitain fut amené à Macdonald ; il demandait le passage pour une colonne attardée qui venait de Viterbe. « Est-ce sérieusement, lui dit le général, que vous faites une telle proposition ? — Mais on m’a parlé d’un armistice. — On vous a trompé ; mettez bas les armes, c’est ce que vous avez de mieux à faire. — Comment ! mettre bas les armes ! Nous nous défendrons, nous sommes en force. — Eh bien ! on va vous reconduire et donner au commandant de Ponte-Molle l’ordre de sabrer ces messieurs ; je vais me coucher. — Est-ce votre dernier mot ? — Certainement. — En ce cas, je me rends. » C’était le chef de la colonne. La scène est jolie, une vraie pantalonnade italienne. Le lendemain parut un ordre du jour félicitant l’armée de ses succès ; la division Macdonald y était mentionnée à peine, et tous les avancemens, toutes les récompenses furent pour le quartier-général. De Rome on marcha sur Capoue, qui capitula ; puis, au lieu de marcher résolument sur Naples, Championnet consentit à l’octroi d’un armistice indéfini. Cette résolution, prise contre l’avis formel de Macdonald, eut du moins un résultat immédiat et décisif ; après une vive et dernière explication avec le général en chef, il lui offrit sa démission, qui fut aussitôt acceptée.