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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 107.djvu/930

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Parmi les obstacles à la production en Italie on doit aussi faire mention de l’intérêt élevé des capitaux. L’État absorbant le capital à mesure qu’il se forme, le loyer de ce qui en reste est assez cher. Que l’on compare seulement l’escompte qui, en Italie, est à 6 pour 100[1], avec celui de la Banque de France, lequel est à 3 pour 100, et ce simple fait suffira pour rendre compte de bien des difficultés que rencontrent non-seulement le développement de l’industrie[2], mais aussi l’amélioration de l’agriculture, et sa transformation par les procédés de la culture intensive.

Si nous examinons maintenant l’ensemble des faits dont nous avons exposé le détail, nous allons voir se confirmer les conclusions qui se dégagent déjà de cette étude.

Le commerce d’un pays se divise en deux grandes branches, le commerce extérieur et le commerce intérieur.

Pour le commerce extérieur, la statistique des douanes nous donne des chiffres assez approchés. Si l’on examine un tableau de la valeur des importations et de celle des exportations annuelles de l’Italie, une chose frappe tout d’abord. La valeur des exportations, laquelle depuis 1877 se maintenait au-dessus d’un milliard[3], sauf une année où elle est inférieure de 50 millions, éprouve à partir de 1887 une dépression subite, qui dure jusqu’à présent, et en 1890 la valeur des exportations tombe à 896 millions.

La première idée qui se présente à l’esprit est qu’il s’agit là d’une de ces crises générales comme le commerce en éprouve périodiquement. Et en effet c’est ce que disait à la chambre M. Crispi. Malheureusement les faits sont absolument contraires à cette hypothèse. Pour toutes les grandes nations commerciales de l’Europe, et même pour une partie de celles de moindre importance, nous trouvons des augmentations, souvent fort considérables, du mouvement du commerce extérieur pendant ces trois dernières années. De 1886 à 1890 l’augmentation de la valeur des exportations françaises est d’environ un demi-milliard, cette augmentation pour l’Angleterre est supérieure à 1 milliard[4], plus du total des exportations Italiennes! L’Allemagne, la Belgique, la Suisse, même l’Espagne,

  1. Tout récemment le gouvernement a fait diminuer l’escompte d’un demi pour cent, mais en revanche il a légalisé l’émission de papier-monnaie précédemment faite par les banques. Dans des circonstances semblables à celles où se trouve l’Italie, la Banque d’Angleterre aurait élevé l’escompte au lieu de le diminuer.
  2. Selon M. Cottrau, pour chaque tonne de travées métalliques, une usine italienne paie pour intérêts, change, impôt sur la richesse mobilière, etc., 29 fr. 70 et une usine belge seulement 2 fr. 50.
  3. On trouvera les chiffres dans les publications officielles. Nous les avons résumés dans l’Economiste français de mai 1891, en donnant aussi les chiffres relatifs au commerce intérieur dont il sera parlé plus loin.
  4. 8,747 millions de francs en 1886, et 10,522 en 1890.