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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 107.djvu/940

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l’on a remis le service des pensions à la charge du budget ! Mais ce qui est plus grave, c’est qu’où a créé toutes sortes d’autres dettes sous les noms les plus variés : obligations 3 pour 100 pour la construction des chemins de fer[1], obligations du Tibre, etc., sans compter les dettes faites par les villes et garanties par l’État.

La dette amortissable de l’État augmente de 567 millions depuis 1884 jusqu’à 1890 et les bons du trésor de 33 millions[2]. Les sommes que le trésor paie à l’étranger pour intérêts et amortissement de sa dette donnent pour 1889 un total de 162 millions, avec une augmentation de 44 millions sur ce que l’on payait en 1885. Il faut bien avouer que jusqu’à présent ces paiemens n’ont pu être faits qu’en créant de nouvelles dettes. M. Luzzatti se propose maintenant de n’avoir plus recours à ce moyen, et cette intention est assurément très louable ; mais si l’Italie ne change pas de politique, l’on ne voit pas bien comment elle pourra se procurer la monnaie métallique nécessaire pour remplir les engagemens contractés à l’étranger.

On a voulu voir la cause des mauvaises conditions où se trouve le budget de l’Italie dans la suppression de l’impôt sur la mouture. M. Crispi, à Turin, s’est exprimé comme si cette suppression avait diminué la charge qui grevait les consommations du pays, et beaucoup de personnes en demeurent persuadées. Ce sont là des choses que répètent les gens qui trouvent commode d’embrasser une opinion toute faite, sans se donner la peine de remonter aux sources et de vérifier les chiffres. La vérité est que l’impôt sur la mouture a été remplacé par d’autres impôts beaucoup plus considérables sur les consommations, et entre autres par un impôt qui lui ressemble fort : le droit d’entrée de 5 francs par quintal métrique sur le blé. Le maximum du produit de l’impôt sur la mouture a été atteint en 1878[3], et cette année-là le total des impôts de consommation, y compris celui sur la mouture, est de 446 millions. Ces mêmes impôts rendirent en 1890 628 milUons, ce qui démontre avec la dernière évidence que non-seulement les consommations ont été grevées de manière à compenser le produit de l’impôt sur la mouture, mais encore qu’elles ont

  1. L’émission de ces obligations a commencé en 1887, et a continué jusqu’à octobre 1889. La somme totale émise est de 1,227 millions (valeur nominale). (Bodio, loc. cit., p. 88.)
  2. Au 30 juin 1890, la dette consolidée est de 9,108 millions pour lesquels on paie 455 millions d’intérêts. Le capital de la dette amortissable est de 2,692 millions, ses intérêts de 107 millions. Les bons du trésor donnent une somme de 277 millions. (Bodio, loc. cit., p. 103.) La France a 2,600 millions de francs de la dette consolidée de l’Italie, et l’Allemagne 43 millions seulement!
  3. 83 millions.