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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 108.djvu/144

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jamais été que de 26 millions : ils avaient été émis en 1874 ; ils étaient remboursables en vingt-cinq ans ; ils devaient être, par conséquent, éteints dans sept ans au moyen de l’annuité de 1,821,500 francs inscrite aux budgets précédens. Malgré la proximité de leur extinction, la commission du budget a cru devoir leur appliquer la mesure qui avait été imposée, l’an dernier, aux porteurs des autres bons de liquidation. On sait que la chambre, sans tenir compte du contrat virtuel qui existait entre l’État et les porteurs de bons, les titres remis à ceux-ci ne réservant en aucune façon au gouvernement le droit de se libérer anticipativement, a décidé le remboursement immédiat de tous les bons en circulation au moyen d’un prélèvement sur l’emprunt. Le but de cette mesure, dont la légalité a été contestée, était de réaliser une légère économie en substituant à des bons qui rapportaient 5 pour 100 le produit de rentes perpétuelles 3 pour 100. Les bons de liquidation étaient en voie d’extinction rapide, et leur disparition eût procuré un allégement au budget, tandis que la somme empruntée pour les rembourser est et demeurera une charge perpétuelle. On a donc, à l’inverse de ce que font d’autres États, rejeté sur les générations à venir le poids d’une dépense encourue dans l’intérêt et pour le compte de la génération présente : on a commis une faute financière et une iniquité.

Ces critiques s’appliquent avec moins de force à l’opération qui doit avoir lieu en 1892, parce que le remboursement des bons dont il s’agit sera effectif et s’opérera non avec des ressources d’emprunt, mais à l’aide d’une recette réellement disponible, la somme à provenir des rentes de la dotation de l’armée étant presque égale au capital à rembourser, 11 millions 1/2 d’un côté et 14 millions de l’autre.

Une mesure beaucoup plus grave et qui appelle un blâme sans restriction est le sacrifice imposé aux caisses d’épargne. Dans un moment de gêne, où il ne voulait pas mettre sa signature sur le marché, le gouvernement a fait prendre à la caisse des dépôts et consignations 240 millions d’obligations trentenaires 4 pour 100 que la caisse a réparties entre le portefeuille des caisses d’épargne privées, de la caisse d’épargne postale et de la caisse des retraites. L’État n’a pas le moyen de rembourser ces obligations qui représentent encore un capital de 202 millions ; néanmoins il impose à la caisse des dépôts et consignations, qui n’est que dépositaire de ces titres, de les échanger contre de nouveaux titres, ne rapportant plus que 3.25 pour 100. C’est une confiscation pure et simple de 0 fr. 75 pour 100 d’intérêt au préjudice des caisses d’épargne. L’argument invoqué par la commission qu’un intérêt de 4 pour 100 « n’est plus en rapport