encore trouvé de clergyman pour bénir leur mariage. Ses forces étaient épuisées ; la main de la mort était sur lui.. Cependant son activité n’en était que plus fébrile. Il courut l’Irlande pendant les mois d’août et de septembre, recueillant des ovations sans portée, prodiguant des harangues sans prix. On le vit, on l’entendit à Dublin, à Drogheda, à Kells, à Thurles, et enfin à Creggs... Il faut en venir à ce lamentable dimanche du 27 septembre où, durant trois heures, sous une pluie impitoyable, Parnell tint son dernier meeting, prononça son dernier discours, qui couvrit à peine quelques lignes dans les journaux du lendemain.
Ce jour-là, habitué qu’il était à la souffrance, il se plaignit d’éprouver des douleurs qu’il ne connaissait pas encore. Le lendemain, il était de retour à Aldrington, près de Brighton, où il occupait une maison avec sa femme et sa belle-fille. Il prit le lit, mais la gravité de son état n’apparut que le matin du mardi 6 octobre. Il vit le danger, la fin certaine : — « Donnez, dit-il, mon amour à mes collègues et à l’Irlande. Puisse-t-elle être soignée dans ses souffrances comme je l’ai été dans les miennes ! » — En anglais, la phrase est très simple, digne d’un homme, qui, dans toute sa vie, n’avait pas prononcé un seul mot à effet. A onze heures du soir, pendant que la mer se gonflait dans un spasme de fureur et que le vent du large secouait les fenêtres à les arracher, le cœur de Parnell cessa de battre. Sa mort a été comme sa vie : calme dans l’orage.
Le dimanche suivant, Dublin vit les funérailles du grand leader. Mais elles ne furent point marquées par la réconciliation solennelle qu’on avait espérée. Ceux qui gardaient le corps de Parnell signifièrent aux chefs du parti adverse qu’ils eussent à se tenir cois dans leurs demeures, sinon ils répondraient du sang versé. Des placards, affichés partout, portaient ces mots en grosses lettres : « Assassiné par les Anglais. » Le peuple défila devant le cercueil de Parnell dans le City hall qui gardait l’écho de sa parole. Puis, O’Connell, du haut de son piédestal, regarda passer ce mort qui, autant que lui et plus que lui, avait connu l’amertume de l’impopularité finale. Il était nuit close lorsqu’on laissa seul Charles Parnell sous les ombrages funèbres de Glasnevin.
Depuis, les symptômes de discorde se sont multipliés et aggravés. Les rues de Cork en proie à l’émeute, Timothée Healy fustigé et cravaché à Dublin, en plein palais de justice, et beaucoup d’autres incidens analogues n’indiquent pas un grand progrès dans l’apaisement des esprits. Cependant les amis d’Amérique commencent à s’irriter et menacent de couper les vivres aux deux partis si un rapprochement ne s’opère. Ce rapprochement s’impose, car le