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concours ne répondrait à ce qu’on en attendait que s’il attestait chez les candidats à la fois la faculté d’apprendre, de comparer et de juger. Et ce n’était pas encore assez : restait à s’éclairer sur leurs aptitudes physiques, leur moralité, leur caractère. Tant d’exigences semblent excessives. Les Anglais en jugèrent autrement. Ils estimèrent pouvoir découvrir une façon de choisir les examinateurs, de composer les programmes et d’organiser les épreuves, qui fournirait sur les candidats toutes les informations désirables.

Un juge de concours n’est trop souvent qu’un homme très savant, très spécial et très indifférent. Il voit le candidat une heure, une semaine, lui donne sa note et le perd de vue pour toujours. Les examinateurs pour les fonctions civiles de l’Inde ne sont point des savans de profession : ce sont, à l’ordinaire, d’anciens fonctionnaires de l’Inde, nommés, pour leur mérite, commissaires du civil service. Ce ne sont point des spécialistes : ils ont, durant des années d’exercice professionnel, pénétré toutes les parties du service. Ce ne sont point des indifférens : ils ont vécu la moitié de leur vie dans l’Inde et s’intéressent passionnément à sa grandeur. Ils n’assistent point à ces épreuves en passant, ils n’ont point hâte d’en sortir pour oublier et concours et candidats : ils ont, de par leurs fonctions, la mission permanente de rédiger les programmes et de préparer les concours ; et l’un des devoirs de leur charge est d’arriver à connaître personnellement et intimement chacun des candidats. C’est à eux que ces candidats se présentent quand ils viennent se faire inscrire ; c’es devant eux qu’ils subiront une préalable épreuve, sorte d’enquête à la fois physique et morale, où l’on se fait une première et rapide opinion de leur santé et de leur caractère ; c’est eux qu’après le concours d’admissibilité et durant tout le temps de la probation, ou « temps d’épreuve, » ils devront convaincre de leur application et de l’intégrité de leur santé et de leur réputation[1] ; c’est d’eux, enfin, qu’ils recevront, après le concours d’admission, le fameux certificat sans lequel le secrétaire de l’Inde ne les nommerait point

  1. Voyez notamment l’article 3 des règlemens. L’article 2 exige du candidat la preuve qu’il est né sujet anglais, qu’il a l’âge et les aptitudes physiques requis, qu’il a une bonne réputation de moralité. Ceci connu, voici le texte de l’article 3 : — « Si une preuve, à première vue satisfaisante, de ces diverses conditions est fournie aux commissaires du service civil, le candidat sera, moyennant paiement des droits prescrits, admis à l’examen. Cependant, les commissaires peuvent, à leur discrétion et à toute époque, pourvu que ce soit avant la délivrance du certificat d’aptitude dont il sera parlé plus tard, ouvrir au sujet de tout candidat et sur les points qu’énumère l’article 2, telle enquête qu’ils jugeront convenable, et, si le résultat de ces enquêtes n’était pas satisfaisant, ce candidat sera déclaré inhabile à être admis au service de l’Inde ; si même il a déjà subi le concours et a été admis comme selected candidate, il sera déchu de sa position de probationer. »