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l’année 1886, qui lui donna une voisine, l’Allemagne. Elles ne datent nullement de notre protectorat sur Madagascar. Quant au gouvernement anglais, nos expansions, comme d’autres, le préoccupèrent, et pour les mêmes raisons. A une époque où tout le monde cherche des colonies, impose des protectorats, se taille des zones d’influence, la première et la plus vieille des puissances maritimes put se croire un peu menacée. De là cette conférence coloniale de Londres, en 1887, où les représentans de nombreuses possessions britanniques furent appelés à délibérer avec la direction centrale de l’empire sur des nécessités de défense commune et d’appui réciproque. En ce qui concerne l’Afrique du Sud, on y tomba d’accord sur un point, non sans quelques marchandages : les colons fourniraient de l’argent pour fortifier Cape-Town, port de commerce, et Simon’s-Town, port militaire qui se trouve à côté ; la métropole se chargerait d’armer les ouvrages dans le style le plus moderne. Port-Elizabeth attendrait un peu, et c’est bien pourquoi l’on y crie au Jean Bart. Cet arrangement convenait fort à la Grande-Bretagne, car son intérêt propre, c’est de protéger son arsenal et son dépôt de charbon. Il y a, en outre, dans les docks de Cape-Town, une forme de radoub extrêmement précieuse, la seule de ces mers lointaines et salissantes, pratiquée tour à tour par les navires de guerre anglais, allemands et portugais qui viennent s’y nettoyer de toute la flore sous-marine, de toutes les incrustations ramassées sous les tropiques. La colonie avait davantage à sauvegarder, mais elle ne pouvait que faire un choix et commencer par les choses les plus urgentes. Ses délégués, M. Hofmeyr et sir Thomas Upington, revinrent donc avec le sentiment d’un devoir accompli, d’un premier résultat gagné, sans perdre de vue la tâche des jours suivans, le développement graduel des forces militaires du Cap.

On s’est proposé depuis lors, dans cette colonie, de prédisposer les esprits, les cœurs et les bourses à l’indispensable réorganisation d’une petite armée visiblement insuffisante. C’est là une affaire toute domestique, sans lien direct avec les besoins de la puissance navale qui se juge satisfaite quand elle a consolidé une importante position maritime. Nous ne savons trop si le Cap mettra jamais un régiment de marche au service de l’Angleterre, comme il semble en avoir eu l’intention dans les circonstances imaginées par M. Nelson Seaforth, — peut-être pour remplacer l’escorte de notre résident-général à Tananarive. Mais nous croyons qu’il songe à en former quelques-uns à seule fin de défendre son territoire, et que ce ne serait pas contre la France. Il trouverait même à les utiliser sans autre objet que l’avancement de