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Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 109.djvu/88

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REVUE DES DEUX MONDES.


avec leur ardeur et leur génie d’improvisateurs, leur imprudence et leur prodigalité[1].

Toutefois, il serait peu sage de se priver à jamais de ce dernier et précieux élément. Tant que l’on étend son empire et qu’on édifie des gouvernemens, on a besoin justement d’hommes de ressource et d’imagination, et il semble bien qu’ils aient été un peu rares dans la dernière affaire de Birmanie. D’ailleurs, d’une façon générale, j’incline à croire que les fonctionnaires de Birmanie ont été inférieurs à ceux du reste de l’Inde. Cela, toutefois, ne prouve rien contre le système en soi. Il n’y a pas, en effet, longtemps que le covenanted service fournit à la Birmanie des fonctionnaires par un recrutement direct, et, d’autre part, les vices de fonctionnement que nous allons signaler tiennent à des causes passagères et facilement déterminables ; les Anglais s’occupent déjà d’y porter remède.

V.

D’ailleurs, n’exagérons rien : le civil service de Birmanie, celui de la première heure et celui d’aujourd’hui, est, en grande majorité, excellent ; quelques-uns, comme sir Charles Bernard et sir Alexander Mackenzie, chief commissioners, comme M. Hildebrand, surintendant des États shans, comme M. Browning, magistrat à Mogok, comme M. Toddnaylor, deputy commissioner de Magwee, etc., honoreraient n’importe quelle administration ; mais, à côté de ceux-là, il s’en est trouvé, même dans le service civil et aussi dans la justice, dans le corps médical, ailleurs encore, de peu expérimentés, de peu dévoués, et même, j’ai le regret de le dire, de peu scrupuleux. La proportion, d’ailleurs restreinte, en est plus élevée que dans toute autre province de l’Inde, et cette seule remarque indique déjà que le mal provient de causes presque purement locales.

La Birmanie, en effet, a contre elle deux choses : l’une lui est propre, c’est sa situation et son climat ; l’autre lui est commune avec le reste de l’Inde, quoique peut-être l’effet en soit chez elle plus énergique et plus malfaisant, c’est, à l’heure actuelle, la passion d’économies du gouvernement.

Dernière venue dans la grande famille indienne, moins salubre que la plupart des autres provinces et surtout encore mal assainie[2], plus loin du gouvernement central et des laveurs dont il

  1. Voir dans Colonies and dependencies, par J.-S. Cotton (p. 28 à 35 et 75 à 80, Macmillan, 1883), d’autres considérations extrêmement curieuses.
  2. Le climat de la Birmanie est assez médiocre, et, dit notre consul à Rangoon, M. Pi-