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En attendant que son livre soit traduit en français, ceux qui peuvent lire l’allemand n’auront plus d’excuse s’ils dénigrent cette littérature tout entière, sans en rien savoir. Cette étude n’offrît-elle pas d’autre intérêt, on pourrait toujours invoquer en sa faveur ce fait, que les écrivains grecs de ces longs siècles constituent le véritable trait d’union, — ou, si l’on veut la transition, — entre la civilisation antique et la renaissance moderne.

Mais ce n’est pas seulement comme faisant suite au passé que cette époque peut nous intéresser. L’empire grec a été, pendant la plus grande partie de son existence, l’état le plus important du monde civilisé d’alors ; au dedans, l’hellénisme, transformé par la religion chrétienne et par l’adoption des traditions romaines, y apparaît sous une face nouvelle ; — au dehors, cet empire exerce autour de lui, dans toutes les directions, mais surtout parmi les peuples slaves, une influence dont les résultats sont encore visibles de nos jours. Son histoire se rattache ainsi aux origines de l’Europe contemporaine. Si nous y voyons la fin de l’antiquité, nous y trouvons aussi les commencemens de l’ère moderne. C’est à ce double point de vue que l’on s’est enfin placé pour comprendre et traiter cette histoire, et c’est là, peut-être, la meilleure explication de l’intérêt croissant dont les études byzantines, depuis quelques années, sont l’objet.

Une question se pose ici tout d’abord : où commence la période byzantine ? — Parmi ceux qui ont traité l’histoire de l’empire d’Orient, plusieurs ont pris comme point de départ la division de l’État sous les fils de Théodose ; d’autres ont préféré le règne de Justinien, ou celui d’Héraclius, ou même celui de Léon l’isaurien. S’il est malaisé de préciser les commencemens de l’histoire politique, les difficultés deviennent encore plus grandes lorsqu’il s’agit du mouvement littéraire de cette longue période. M. Krumbacher remonte jusqu’à Justinien, pour la simple raison que son travail, faisant partie de la même série que le livre bien connu de M. W. Christ, devait en être la suite. Dans le fait, il considère le milieu du VIIe siècle comme l’époque où finit l’antiquité et où une nouvelle période commence. Dans son introduction, il défend cette thèse par des argumens dont il serait difficile de contester la valeur. Cependant, n’y aurait-il pas quelque chose de trop arbitraire dans ces démarcations ?

A première vue, elles paraissent comme justifiées par le nom