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langue hollandaise et à 30,000 le nombre des étrangers, — en l’absence de statistiques, — si nous tenons compte surtout du très-nombreux élément noir qui s’est familiarisé avec l’idiome des boers, nous voyons les avantages du côté du néerlandais, à une condition néanmoins : que l’éducation s’en mêle. Dans l’État-Libre, le hollandais a la situation d’une langue dominante et privilégiée, comme le français en Belgique ; cependant l’anglais y est fort répandu, et le principal journal de Bloemfontein, l’Express, sacrifie au bilinguisme. Au Cap, l’administration ignora longtemps le néerlandais, de parti-pris. Les boers coloniaux, en général, ne connaissaient pas d’autre langage ; mais, dans les villes, la postérité des Hollandais dédaignait le patois des campagnes et préférait le dialecte des conquérans, clé de l’instruction, de la politique et du commerce. Lorsqu’il y eut un parlement, de nouvelles dispositions parurent : les députés, souvent, maniaient fort mal l’instrument dont ils devaient se servir ou ne comprenaient pas la discussion. Un président de la chambre basse, mort depuis, M. Christoffel Brand, réclamait déjà l’admission du hollandais dans les débats législatifs. Ses fonctions l’obligeaient à dire la prière en anglais chaque fois qu’il ouvrait la séance ; mais il affectait toujours de la lire avec difficulté sur la feuille de garde d’un Nouveau-Testament où il l’avait collée, bien qu’il fût capable de parler la langue de Milton, quand il le voulait bien, comme un professeur d’Oxford ou de Cambridge. Un beau jour, le volume avait disparu ; quelque malicieux collègue l’avait dérobé, et M. Brand prétendit au milieu de l’hilarité générale qu’il ne savait point par cœur cette prière dont il donnait lecture soixante-dix-huit fois par session. Après l’établissement du régime responsable et la guerre d’indépendance du Transvaal, qui réveillait une fibre nationale chez tous les descendans de colons hollandais, après l’éclosion de l’afrikandérisme, la propagande de M. du Toit en faveur du patois afrikaans, les Anglais durent transiger. En 1882, l’emploi du néerlandais devint facultatif dans les chambres. Deux ans plus tard on l’autorisait devant les tribunaux. Beaucoup plus récemment, une loi spéciale a obligé les jeunes gens qui veulent entrer dans l’administration et qui subissent l’examen dit du service civil à faire preuve d’une force suffisante en hollandais classique. Reste l’école.

Jusqu’à présent, le néerlandais a figuré dans l’examen d’immatriculation, répondant à notre baccalauréat, sur le même pied que le français, l’allemand, le cafre et le sessouto, avec droit d’option. On demande que la connaissance de cette langue procure désormais un nombre de points égal à celui d’une branche essentielle. On veut aussi l’introduire dans l’examen élémentaire, à la