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de la race au milieu de laquelle ils vivent. » Le baron d’Étreillis, soutenant la même thèse, était même allé jusqu’à dire que, « en supposant l’anéantissement complet de tous les chevaux existant actuellement dans la plaine de Tarbes et leur remplacement par autant de têtes de chevaux normands, ceux-ci deviendraient, à la suite d’un nombre d’années impossible à préciser, semblables à ceux qu’ils auraient remplacés. »

Assurément, ces opinions acceptées par beaucoup d’éleveurs et même par l’administration des haras, — qui pourtant en revient un peu aujourd’hui, croyons-nous, — sont justes dans une certaine mesure. Il est certain que l’influence du père et de la mère, celle de l’alimentation, et enfin celle du sol et du climat ont toutes trois une importance relative. Mais le degré d’importance qui appartient à chacune dans un pays comme le nôtre est-il bien indiqué par les auteurs que nous venons de citer et par la plupart des écrivains hippiques ? Nous croyons pour notre part que les hommes de cheval interprètent mal les théories savantes sur lesquelles ils prétendent ici s’appuyer. Les naturalistes ont pu constater, chez certaines espèces d’animaux importées de très loin et dont on a changé presque complètement les conditions d’existence et la nourriture, des modifications sensibles. Il se pourrait que ces modifications ne fussent pas exactement ce qu’eux-mêmes ont pensé ; que, par exemple, certains êtres transportés sous un ciel très différent de celui sous lequel ils sont nés fussent seulement condamnés à dépérir, puis à s’éteindre, leurs organes n’étant pas faits pour supporter les conditions de leur vie nouvelle ; que, chez d’autres ayant pu vivre et se reproduire, la peau changeât de couleur, perdit dans les pays chauds ses longs poils tandis que ceux-ci s’allongent dans les pays froids, etc., sans que pour cela la structure ni les organes principaux subissent véritablement aucune transformation. Quoi qu’il en soit, nous ne nous permettrons pas de discuter des faits que nous n’avons pas nous-même examinés. Nous ne parlerons donc que des chevaux. Or tout ce qu’on a écrit pour montrer qu’ils se transforment en passant d’un sol sur un autre ne nous paraît fondé que sur des observations dénuées de toute valeur scientifique, et l’on n’a jamais fait, que nous sachions, d’expériences concluantes. Les chevaux et les jumens arabes qu’on a transportés dans le nord, en France et en Angleterre, ont pu donner quelques produits plus grands qu’eux, mais ces cas isolés ne sauraient démontrer d’une manière générale que le climat de la France ou de l’Angleterre accroisse la taille des chevaux arabes, laquelle n’est d’ailleurs pas invariable à quelques centimètres près dans les pays d’origine de ces animaux. Les mêmes écrivains qui mentionnent ces faits reconnaissent d’autre part, — et chacun peut cette fois