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Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 111.djvu/541

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événemens les instruisent. Le parti qui gouverne avait annoncé « la politique des résultats. » Les résultats apparaissent. La logique des anarchistes commence à arrêter, par des batailles dans les églises, la licence de la superstition, et à protester, à coups de dynamite, contre l’injuste répartition des richesses. On inaugure la politique des explosifs. Les esprits les plus indifférens aux principes, et qui se réveillent seulement aux conséquences, ont perdu leur quiétude. Le pressentiment de périls redoutables, prochains, pèse sur la paix où l’on vit encore ; on commence à juger les hommes sur qui repose la responsabilité de l’avenir. Et fussent-ils résolus à défendre la société contre les dernières violences, oh constate l’immorale contradiction d’un régime où le gouvernement réprimerait en un jour d’énergie sanglante les attentats provoqués par la succession continue de ses faiblesses, de ses lâchetés ; on se demande combien de temps la corruption qui est en lui laissera saines les forces dont il a besoin pour assurer l’ordre. On découvre que tous les ouvrages avancés ont été démantelés ou livrés, et que l’ennemi touche au corps de place. On sent que les auteurs du mal ne sont pas capables de le guérir, que des hommes de parti et de secte ne deviendront jamais des hommes d’État, et l’on aspire à des chefs qui ne cherchent pas leur devoir dans les yeux de la populace, mais dans le regard desquels la nation reconnaisse enfin l’autorité.


VI

Conservateurs, la fortune est vôtre si vous ne la repoussez pas, et vous ne la repousserez pas, car elle est aussi la fortune de la France. La France a besoin d’un gouvernement sage que seuls vous pouvez lui donner. Il vous suffit, pour redevenir maîtres, de ne plus attendre un roi que vous êtes incapables de restaurer, et de vous soumettre à une république que vous êtes incapables de détruire. Ne parlez plus de votre honneur, il consiste à faire tout ce qui, sans être mal en soi, est nécessaire au pays ; ne parlez plus de vos répugnances, elles ne changent rien à votre devoir. La France, qui a droit à tous vos sacrifices, attendra-t-elle en vain de vous un acte de raison, d’intérêt, et préférerez-vous à votre patrie la fidélité à un homme et la haine d’un mot ?

Et puisque tout vous sollicite de prononcer enfin ce mot, sachez-le bien dire. Il y a une façon de prendre son parti, qui est de le pleurer, une manière de rompre avec le passé en gardant