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REVUE MUSICALE

Théâtre de l’Opéra-Comique : Enguerrande, drame lyrique en quatre actes et cinq tableaux, paroles de MM. E. Bergerat et V. Wilder ; musique de M. Chapuis. — Théâtre de l’Opéra : Salammbô, opéra en cinq actes et huit tableaux, paroles de M. du Locle, d’après G. Flaubert ; musique de M. Ernest Reyer.

Si, comme il est possible, car ils ont parfois de la malice, MM. Bergerat et Wilder ont voulu se moquer du public, le public, qui, lui non plus, n’est pas toujours une bête, le leur a bien rendu. Il a pris les choses en riant. Et quelles choses ! Voici.

Aux rivages de Sicile, le roi Jean III est mort. Vive Gaétan XII ! Mais Gaétan, neveu du défunt, n’entend pas lui succéder. Poète, sculpteur, épris d’idéal et de chimère, la royauté n’a rien qui le tente. Sans compter que jadis à Florence, tenant sa mère par la main, il vit un enfant royal que le peuple insultait. Sa mère alors lui fit jurer de n’être jamais roi. Par honneur et par caprice, Gaétan ne veut donc pas régner. Rebelle à l’hyménée, il ne veut pas davantage épouser sa cousine Enguerrande, reine de Corse, qui lui fait, par un ambassadeur du nom de Mélibée, offrir sa main et son île. Mais il arrive que dans une forêt voisine de Palerme, Enguerrande elle-même, qui s’y trouve par hasard, reçoit une averse épouvantable. Elle entre, pour se sécher, dans la hutte d’un bûcheron. Gaétan, qui survient, ayant mis l’œil au volet disjoint de la fenêtre, aperçoit la princesse et demeure en extase. Il contemple, il admire, il aime et quand la dame, rhabillée, sort de la cabane, il tombe à ses genoux. Il se nomme ; elle se nomme ; pour le punir de ses refus d’hier et aussi parce qu’il l’a vue trop en négligé, elle va le frapper d’un poignard ; mais soudain radoucie : — « Je me suis mis en tête, dit-elle, de n’épouser qu’un homme ayant titre de roi. » — Désespoir de Gaétan devant cette inacceptable condition. Arrivée de la municipalité de Palerme, qui, sur l’avis du