Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 111.djvu/794

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

24 karats. Les bonnes monnaies d’or étaient à 22 et 23 karats, les bonnes monnaies d’argent variaient entre 11 deniers et 11 deniers et demi ; c’est-à-dire qu’elles contenaient une proportion d’un douzième ou un vingt-quatrième seulement d’alliage, tandis que les nôtres en contiennent un dixième. Mais la tolérance légale de poids et de titre, concédée autrefois beaucoup plus largement qu’aujourd’hui, la façon surtout dont on vérifiait les espèces, longtemps après leur mise en circulation, et la négligence voulue, encouragée au besoin par le gouvernement, des directeurs d’ateliers monétaires à se conformer aux règlemens, permettent d’affirmer que la quantité de métal fin, réellement contenue dans les monnaies anciennes, ne dépasse pas celle des pièces contemporaines sous le rapport du titre, et, sous le rapport du poids, il est certain que ces dernières en contiennent beaucoup plus.

De nos jours les États d’Europe démonétisent les pièces, diminuées par le frai de 1/2 pour 100 de leur poids, si elles sont en or, et de 1 pour 100 si elles sont en argent. Jadis le descri effectif des monnaies était très rare ; et les pièces n’avaient pas à redouter seulement l’affaiblissement naturel, provenant d’un long usage. Jusqu’au milieu du XVIIe siècle (1645), où l’emploi du balancier et la fabrication « au moulin », inventée depuis cent ans, mais non encore adoptée, l’emportèrent définitivement sur l’antique fabrication au marteau, le rognage des espèces d’or et d’argent, d’une rotondité toujours douteuse et d’une tranche mal définie, se pratiqua sur la plus vaste échelle, par des moyens mécaniques ou chimiques. Ce fut au moyen âge, et jusque sous Louis XIII, une industrie fort répandue, dont la potence, prodiguée à ceux qui l’exerçaient, ne parvint pas à arrêter l’essor.

En restreignant aux pièces neuves, sortant pour la première fois d’un hôtel des monnaies, ou aux lingots qui y entrent afin d’y être transformés en espèces, les recherches sur la valeur du marc d’argent, on trouve deux sortes de prix : celui qui est payé par l’État aux particuliers, pour les 245 grammes de métal fin qu’il achète ; celui que l’État revend au public ces 245 grammes monnayés. Il est un troisième prix du marc d’argent, aussi important que les deux autres, et moins facile à connaître exactement, parce qu’il n’en a pas été dressé de statistique : c’est le prix commercial et libre, que l’on paie entre personnes privées.

Ces prix ne se ressemblent jamais complètement, obéissent à des lois qui leur sont propres, et cependant influent toujours les uns sur les autres. Même aux périodes où le gouvernement s’abstient de toute ingérence dans le numéraire, il y a toujours entre le cours commercial et le cours légal du marc d’argent, exprimé en livres, un écart qui représente le droit de « seigneuriage, » — impôt et