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sur lesquels l’accord pouvait se faire à la dernière heure. S’ils n’avaient ni la popularité de Cleveland, ni la renommée de Hill, moins connus, ils offraient moins de prise aux attaques de leurs adversaires, et l’on savait que, quelles que fussent ses préférences individuelles, le parti démocratique voterait en masse pour l’élu de la convention.

A onze heures du matin, l’immense hangar en bois, temporairement élevé pour cette circonstance, regorgeait de monde. Au centre siégeaient les délégués et s’élevait le bureau du président. Dans la vaste galerie qui régnait autour, se pressaient plus de 20,000 spectateurs. A onze heures et demie la séance s’ouvrit, sous la présidence d’âge d’Owens, par une prière du révérend Albert H. Henry, puis le comité chargé de vérifier les pouvoirs des délégués présenta son rapport qui fut adopté. On procéda ensuite à l’organisation définitive du bureau ; William L. Wilson, de la Virginie occidentale, fut élu président de la convention et, après un court intervalle de repos, l’on aborda l’examen et la discussion de la plate-forme démocratique.

L’on désigne ainsi le programme des revendications du parti, le drapeau qu’il arbore en opposition à celui de ses adversaires républicains. Ce programme, court et précis, est préparé d’avance par un comité spécial et rédigé avec le plus grand soin ; il résume l’ensemble des mesures sur lesquelles l’accord est complet ; laissant de côté les points secondaires, on s’étudie à y présenter, en des formules concises, mots d’ordre intelligibles aux masses, les idées générales adoptées par le parti, ’celles-là surtout qui sont en opposition marquée avec celles des adversaires. Le programme du parti démocratique débutait par une vigoureuse attaque contre le tarif protectionniste, qu’il qualifiait « d’impôt levé sur les masses, au profit d’une oligarchie de manufacturiers. » Il dénonçait les effets désastreux de cette mesure « qui concentrait entre les mains de 17,000 individus la moitié de la richesse de la grande république, et livrait à 250 capitalistes un douzième de l’actif total de 63 millions de citoyens. » Dans un discours passionné, Neal, l’un des orateurs autorisés du parti démocratique, déclara que a le régime économique inauguré par l’administration républicaine et par Harrison était aussi dangereux pour les institutions nationales qu’avait pu l’être autrefois le principe de taxe sans représentation et qu’il justifiait, de la part des masses, l’adoption de mesures aussi révolutionnaires que celles à l’aide desquelles les fondateurs de la république avaient secoué le joug odieux de l’Angleterre. »

Mise en première ligne, cette revendication du parti démocratique constituait un terrain solide pour la lutte présidentielle ; elle