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LES PHOSPHATES DANS L’AGRICULTURE


partie, ce qui, à la fin de l’été, reste disponible et serait infailliblement perdu dans le cours de l’hiver. M. Dehérain, auquel on doit d’intéressantes études sur cette question, a montré qu’on pourrait ainsi utiliser une partie notable de cet élément précieux avant son élimination par les pluies.

Le manque de fixité de l’azote nous oblige donc à nous adresser à des engrais contenant cet élément, pour entretenir et augmenter la fertilité du sol, et, sauf les cas de richesse exceptionnelle en humus, que nous avons cités plus haut, les engrais azotés doivent se joindre aux engrais phosphatés.

À l’appui de cette thèse, il convient de citer quelques expériences culturales ; nous les empruntons à MM. Lawes et Gilbert, les célèbres expérimentateurs anglais qui ont cultivé, pendant quarante-deux années consécutives, du blé sur une même terre. Les rendemens moyens pendant cette longue période ont été les suivans, par surface d’un hectare : sans engrais, 12 hect. 5 ; avec phosphate, 14,6 ; avec phosphate et azote, 23,6. Pour l’orge, cultivée pendant vingt années sur le même sol, ces savans ont obtenu : sans engrais, 17 hect. 9 ; avec phosphate, 22,9 ; avec phosphate et azote, 42,2.

On voit donc que l’acide phosphorique ne produit tous ses effets que lorsqu’il est associé à l’azote.

La présence des autres matières fertilisantes, telles que la potasse et la chaux, est également indispensable ; mais il y a beaucoup moins à se préoccuper de ces deux substances, la potasse existant en quantité notable dans presque toutes les terres du territoire de la France, et ne devant être donnée comme fumure que dans certaines conditions de sol et de culture.

Pour la chaux, elle est abondante dans la plupart des terres, et c’est exceptionnellement qu’elle est en proportion trop minime pour les exigences des plantes.

II.

Ces données générales étant exposées, examinons les divers produits phosphatés que la nature et l’industrie mettent à notre disposition et les conditions pratiques dans lesquelles nous pourrons les appliquer aux diverses cultures, pour en obtenir des résultats avantageux.

La nature nous offre les phosphates sous forme de gisemens dans différens étages géologiques. Ce sont tantôt des rognons ou des nodules, tantôt des filons ou des concrétions rocheuses, tantôt des sables ou de la craie.