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qui renferme de mordantes critiques de l’enseignement donné à Saumur et dans les régimens.

Le capitaine Raabe se servait peu de la longe et du caveçon, mais il insistait beaucoup sur le travail à pied, à la cravache, ce qui me paraît une perte de temps considérable et nécessite en outre une habileté toute spéciale. Après avoir quitté l’armée, il continua pendant toute sa vie de s’adonner à l’équitation de haute école et à l’étude de la locomotion et forma un grand nombre d’élèves, parmi lesquels MM. Aug. Raux, Barroil, le commandant Bonnal, Lenoble du Teil, qui publièrent d’importans ouvrages.

Le capitaine Guérin, nommé, en 1855, écuyer en chef à l’école de cavalerie, était depuis longtemps partisan du système Baucher, sur lequel devait s’établir sa propre réputation. Le comte d’Aure l’avait souvent plaisanté à ce sujet. M. Guérin s’efforça du moins de concilier les deux écoles opposées et se montra aussi brillant cavalier à l’extérieur qu’au manège.

C’est encore vers cette époque que le comte Savary de Lancosme-Brèves, très habile écuyer, publia plusieurs ouvrages qui méritent une attention particulière. Ses théories sur l’art et sur la pratique de l’équitation sont excellentes, bien que l’auteur ait cherché à leur donner une apparence trop scientifique en prétendant que l’équitation est une science exacte ; il est d’ailleurs le premier écuyer qui, après avoir montré toute l’importance du rôle des sens dans le dressage du cheval, ait bien défini le parti que le cavalier peut tirer de l’aide du corps, en pesant davantage sur l’un ou sur l’autre étrier selon les mouvemens qu’il veut faire exécuter. C’était là une innovation fort heureuse dont on n’a sans doute pas compris toute l’utilité, puisqu’on enseigne encore aujourd’hui des principes opposés à ceux si inattaquables de Lancosme-Brèves.

Le lieutenant-colonel Gerhardt, adepte de Baucher, partisan des flexions à pied et des assouplissemens à la cravache, publia plusieurs ouvrages, notamment son Traité des résistances du cheval, dans lequel il insiste sur la nécessité de préparer d’abord le cheval par des exercices gymnastiques et des flexions à pied, puis de modifier son équilibre en chargeant davantage telle ou telle partie par la position donnée à l’avant-main et à l’arrière-main pour triompher de toutes les résistances provenant d’un défaut de conformation. Cette méthode, fort instructive et fort intéressante pour d’habiles écuyers, ne me paraît pas susceptible d’être appliquée par la généralité des cavaliers, qui ne pourront jamais que tirer parti tant bien que mal des aptitudes naturelles de leurs chevaux. L’auteur examine aussi la question de l’instinct et de l’intelligence chez le cheval et, tout en constatant que cette dernière est à peu près nulle, il dit