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majorité de 97,883 voix, mais Harrison réunissait 233 votes électoraux et Cleveland 168 seulement.

En fait, les forces dont disposent les deux partis qui se disputent le pouvoir sont à peu près égales. Lors de l’élection de 1876, le parti républicain, représenté par Hayes, ne l’emportait que d’un vote électoral : 185, contre 184 pour Tilden. En 1880, Garfield, candidat républicain, recevait 214 votes électoraux contre 155 à Hancock, démocrate ; mais, en 1884, Cleveland, démocrate, réunissait 219 votes contre 182 à Blaine. On voit combien parfois est faible l’écart entre les deux partis et combien incertaine l’issue de la lutte actuelle. Aussi, de part et d’autre, redouble-t-on d’efforts, pour déplacer les voix et conquérir la majorité. C’est affaire d’habileté, de tactique et d’organisation.

Dans les deux camps, cette organisation est identique ; elle est le résultat d’une longue série de tâtonnemens et d’une longue expérience ; chacun de ses rouages a été essayé, perfectionné, combiné en vue du maximum d’effet à en obtenir, aussi n’a-t-on garde d’y rien changer. Décrire l’organisation d’un parti, c’est décrire celle de l’autre ; le nombre des comités est le même, mêmes aussi leur hiérarchie, leur coordination, leur mode de fonctionnement et jusqu’à leurs dépenses.

À la tête de ce mécanisme savant se trouve, tout d’abord, l’élu de la convention, le représentant du parti. Sa situation en vue, son rôle possible de président futur, le relèguent dans une inaction relative. Il agit peu, parle peu, écrit moins encore ; les hommes politiques qui l’entourent et dont l’avènement dépend de son succès, veillent sur lui et autour de lui, écartant importuns, indiscrets, solliciteurs et reporters. Un mot imprudent, une déclaration malencontreuse, peuvent compromettre son élection. La plat-form, ou le programme du parti, adopté par la convention dont il est l’élu, accepté par lui, est supposé être l’exposé fidèle de ses vues politiques et répondre à toutes les questions que l’on est en droit de lui poser. Il se renferme dans ce programme et s’y cantonne ; il n’en sort et ne se découvre qu’au cas où, dans le cours de la campagne présidentielle, surgit un incident grave de politique intérieure ou extérieure, et la solution qu’il préconisera sera ! e résultat de délibérations sérieuses avec ses conseillers.

Au premier rang de ceux-ci, auprès de lui, mais non au-dessous de lui, est l’homme politique, le chef dirigeant du parti, le plus souvent le secrétaire d’État futur de la nouvelle administration. Son rôle est autrement actif ; ce fut celui que joua James Blaine dans la dernière campagne électorale qui amena Harrison à la Maison-Blanche et Blaine au pouvoir. À lui incombe la tâche de