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ostensible du parti, celui dans les mains de qui se concentrent les informations transmises par les state committees, les comités d’État. Jour par jour, heure par heure, il suit les évolutions de l’opinion publique, ses brusques reviremens, les gains et les pertes à enregistrer à l’actif ou au passif du parti ; il en démêle les causes et les indique au chef politique. Homme de parti lui-même, il est surtout administrateur habile, politicien doublé d’un homme d’affaires expérimenté et intègre. Ce n’est pas là sa moindre qualité, ni son moindre titre. Il a le maniement des fonds ; il en dispose à sa guise et n’en rend compte, la campagne terminée, qu’aux chefs politiques du parti, qui n’ont d’ailleurs aucun droit de révision et qu’absorbent d’autres préoccupations. Il est sans exemple que l’homme auquel incombe cette lourde responsabilité ait profité de ses fonctions pour s’enrichir ; il courrait plutôt risque de se ruiner, malgré tout son savoir-faire.

De son choix heureux, de la confiance qu’il inspire, dépend, en grande partie, le montant des contributions, volontaires et autres, qui alimentent la caisse du parti. Ce montant varie, mais il est, à peu de chose près, le même dans un camp et dans l’autre ; il s’accroît d’ailleurs à chaque élection présidentielle. En 1880, les souscriptions recueillies par le comité central républicain, alors présidé par le marshall Jewell, s’élevaient à 450,000 dollars, 2,250,000 fr. En 1884, le même parti encaissait 2,500,000 fr. ; en 1888, le total s’élevait à 4 millions pour le parti républicain, 3,550,000 francs pour le parti démocrate ; cette année l’on estime à 5 millions le montant recueilli par le comité central de chaque parti, soit 10 millions pour les deux. Ces sommes sont fournies par des milliers de souscripteurs ; elles varient depuis quelques dollars jusqu’à 10,000 et 20,000 ; elles proviennent de toutes les classes de la population. Sur la liste, figurent des maisons de banque et de commerce dont on retrouve les noms sur la liste adverse et pour le même chiffre ; elles ont des amis et des cliens dans les deux camps et ne veulent pas s’aliéner le parti vainqueur, quel qu’il soit. Parfois aussi, comme en 1888, apparaît le nom d’un grand capitaliste souscrivant pour 1,250,000 francs.

À cette première mise de fonds, il faut ajouter les sommes encaissées par les comités d’État, de l’organisation et du rôle desquels nous parlerons plus loin. Leur total varie considérablement d’un État à l’autre, suivant la richesse de la population et aussi la passion qu’elle apporte dans la lutte. On peut évaluer le montant de ces souscriptions locales à environ la moitié de celui qu’encaisse le comité central, soit à peu près 5 millions à répartir entre les deux camps. « Ces fonds, en quelque sorte officiels, et dont le total est connu,