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plus d’une fois : dissentimens entre les libéraux avancés et les libéraux plus modérés, entre les protectionnistes à outrance, comme M. Gamazo, et les défenseurs d’une certaine liberté commerciale, comme M. Moret, entre les partisans des économies et ceux qui se refusent à réduire les dépenses de l’armée ou de la marine. Si habile tacticien qu’il soit, M. Sagasta, dans sa carrière ministérielle d’il y a quelques années, n’a pas toujours réussi à concilier tous ces dissentimens, et il est allé de crise en crise. Réussira-t-il mieux aujourd’hui ? De là dépend l’avenir du nouveau ministère libéral à Madrid.


CH. DE MAZADE.


LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

La grande baisse de la rente française, de 97.50 à 93.50, s’est faite dans les quinze jours qu’a duré l’interrègne parlementaire, c’est-à-dire du 26 décembre au 10 janvier. Au moment même où un vote de confiance donné au ministère, et la séparation des chambres, semblaient ouvrir une période de calme relatif dont la Bourse pouvait profiter pour se remettre des émotions qui l’avaient agitée depuis le commencement du mois, des ventes considérables de rente 3 pour 100 accrurent encore le trouble et marquèrent le début d’une campagne générale de baisse. La rente fut compensée fin décembre à 95.90 et perdit encore plus de deux unités dans la première semaine de janvier.

Rien, au dehors, ne justifiait la dépréciation qui se produisit dans ce court intervalle sur les cours de nos fonds publics, de la plupart des fonds internationaux et d’un grand nombre de valeurs. L’argent, malgré les besoins habituels de fin d’année, était extrêmement abondant. Contrairement à des rumeurs mises en circulation pour faire le jeu des baissiers, les retraits de dépôts aux caisses d’épargne ne dépassaient point la proportion normale, et l’on apprenait, dès le 2 janvier, par la publication mensuelle du relevé des opérations de la Caisse des dépôts et consignations, que cet établissement avait pu consacrer en décembre, en dépit de la crise politique, de l’émoi de la chambre, du désarroi gouvernemental et de l’ajournement du budget, un capital de 36 millions de francs à des achats de rentes.

Le terrain était donc bien préparé pour une reprise, vers le 8