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Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 116.djvu/359

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Le clergé, dépouillé de tout son patrimoine, est pauvre dans la plupart des diocèses. Il se recrute insuffisamment, si bien que les évêques de ce pays, où jadis les moines abondèrent, sont obligés d’aller chercher des prêtres en Espagne. Il n’y a en effet plus guère d’intérêt humain à devenir curé ; en revanche, le niveau de la moralité et de l’instruction se relève d’année en année dans le clergé. Avec les vieilles immunités des couvens, les grands abus d’autrefois ont disparu et les congrégations religieuses qui se reforment, avec des procédés légaux semblables à ceux usités en France et en Italie, ne sont plus que d’utiles et modestes auxiliaires des évêques. Ceux-ci sont, depuis 1857, nommés en toute liberté par le pape ; la constitution ne reconnaissant plus l’Église catholique, les pouvoirs civils sont censés ne pas connaître son existence. En 1863, Pie IX créa de son propre chef plusieurs évêchés et, en 1891, Léon XIII a érigé cinq nouveaux sièges et modifié les circonscriptions des provinces ecclésiastiques, sans que le gouvernement s’en soit occupé. Maintenant le nombre des sièges épiscopaux est le double de ce qu’il était en 1857. Les évêques actuels sont tous exemplaires. Quelques-uns sont des hommes de talent. L’évêque de San-Luis de Potosi, Mgr Montes de Oca, a une éloquence et une largeur de vues qui, en Europe, lui assureraient une réputation universelle. Dans son séminaire, les aspirans à la prêtrise apprennent l’anglais, et, à propos des grandes cérémonies religieuses, des invitations commencent à être échangées entre l’épiscopat mexicain et l’épiscopat des États-Unis. Ces rapprochemens sont l’indice d’une profonde transformation dans les idées du clergé et ils peuvent être très féconds pour l’avenir de la religion.

Pratiquement, la question des biens ecclésiastiques n’est plus guère soulevée. Mgr Labastida, qui avait été le véritable auteur de l’élévation au trône de Maximilien, s’était rapproché de Porfirio Diaz, dans les dernières années de sa vie, et il a, avec beaucoup de sagesse, facilité les compositions, c’est-à-dire les arrangemens qui au point de vue de la conscience légitiment la possession des acquéreurs. C’est tort heureux ; car si l’ancien parti catholique et conservateur n’existe plus comme facteur politique, il n’en demeure pas moins un élément social considérable, et aucun gouvernement ne pourra s’asseoir définitivement en l’ayant contre lui.


III

Ces résultats, Porfirio Diaz les a obtenus par l’armée et parce qu’il sait la tenir toujours en main. Dans un pays pareil, l’armée