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EN JUDÉE

DERNIÈRE PARTIE[1].


21 septembre.

Une à une, nous faisons toutes les excursions obligées : les tombeaux des rois, la maison de saint Joseph, la citerne de Marie, la citerne de David, le champ de Booz : j’avoue n’y trouver qu’un médiocre intérêt, et sincèrement n’y rien sentir. Il faut en vérité un cœur de pèlerin russe pour s’émouvoir à la vue de tous ces lieux saints où les hommes et les choses sont si différens de ce que nous avons rêvé. Devant chaque pierre et chaque grotte de la Palestine, on a beau se répéter ce que content les moines et les drogmans, on conclut froidement qu’il s’est peut être passé là quelque chose, et cette idée ne sort pas de la cervelle lucide pour envahir l’être obscur qui rêve et qui sent. À Bethléem, je me suis surtout arrêté devant le marché pour y suivre, transposées en style oriental, tant de scènes qui sont familières à nos villages d’Europe.

Dans ces tableaux champêtres de terre-sainte, il y a toujours une grâce lumineuse et simple. C’est ici l’aire commune de terre battue que l’on retrouve dans tous ces hameaux d’Orient ; les paysans y vannent leur grain, les voyageurs ont le droit d’y planter leur tente et d’y tendre une corde pour aligner leurs chevaux. À Bethléem, la place publique s’ouvre sur un sommet de colline.

  1. Voyez la Revue du 15 mars.