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Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 117.djvu/897

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puis les conservateurs, puis les progressistes, puis les nationaux-libéraux, puis les socialistes. Le gouvernement disposait de 132 voix termes et fidèles ; l’opposition, de 265 voix. Le centre était l’arbitre de la situation ; selon qu’il se déplaçait à droite ou à gauche, il déplaçait du même coup la majorité. La mort de M. Windthorst, son orateur, son tacticien, le créateur et l’éducateur du parlementarisme en Allemagne, avait été pour lui une rude épreuve ; mais, le chef disparu, il restait ses lieutenans. Ce sont, aujourd’hui, les lieutenans d’Alexandre. Le baron Huene, M. de Ballestrem, tirent d’un côté, du côté des conservateurs, avec lesquels ils ont, d’ailleurs, plus d’une affinité de nature ; M. Lieber, M. Porsch, le comte Preysing, deviennent, dans la fraction de beaucoup la plus nombreuse, des personnages consulaires. Au demeurant, la scission, la cassure n’est pas aussi nette ; bien des fascines peuvent encore être jetées sur le fossé. Il est probable que, malgré tout, le centre reviendra, aux élections du 15 juin, à peu près intact et compact. Parmi les progressistes aussi, une scission s’est opérée ; M. Rickert, M. Hinze, ont dit adieu ou au revoir à M. Richter. Il en résultera une nuance de plus dans l’arc-en-ciel, déjà chargé de couleurs, des partis, un petit groupe intermédiaire entre les progressistes intransigeans et les nationaux-libéraux, qui défendront probablement avec succès leurs positions, ainsi que les conservateurs.

Épuisons la série des probabilités : il est probable que les socialistes n’auront pas perdu de terrain ; peut-être même en gagneront-ils, pas autant toutefois qu’ils s’en flattent. — Dans les huit élections auxquelles il a été procédé depuis vingt-deux ans, les conservateurs libres sont partis de 54 sièges en 1871 pour s’établir finalement aux environs de 70 ; les conservateurs libres ont été ramenés de 38 à 27 ; plus entamés encore, les nationaux-libéraux se sont vu graduellement réduire de 119 à 40 ; rien ne pouvait les retenir sur la pente. Pendant ce temps, le centre était en ascension droite, de 58 à 106 ; de même, les progressistes passaient de 45 à 70. Les socialistes montaient d’un mouvement lent, mais régulier ; de 1, en 1871, à 36, en 1890.

Maintenant si, au lieu de prendre pour base le nombre des sièges, on s’arrête au nombre des voix obtenues, comment ne pas remarquer que, tandis que les conservateurs purs se maintiennent, avec des alternatives de hausse et de baisse, aux environs de 900,000 voix, les conservateurs libres aux environs de 450,000, les nationaux libéraux presque constamment aux environs de 1,100,000, le centre a doublé ses voix en vingt-deux ans (1,420,000 en 1890 contre 718,000 en 1871) ; que les progressistes les ont quadruplées(l,150,000 contre 348,000) ; que les socialistes