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UNE


ENQUÊTE SUR L’ÉGYPTE




L’Égypte et les Égyptiens, par le duc d’Harcourt. Paris, 1893 ; Plon, Nourrit et Cie.


M. le duc d’Harcourt nous avait donné en 1887 un premier livre, Quelques réflexions sur les lois sociales. Ceux qui eurent la bravoure de passer par-dessus ce titre rébarbatif n’ont certainement pas oublié l’ouvrage, où se manifestait un esprit indépendant et original ; ni la surprise toujours délicieuse qu’ils éprouvèrent en trouvant un homme au lieu d’un auteur. L’homme n’invoquait que sa propre expérience, il regardait les choses par-dessous les mots, il brisait résolument les clichés qui déforment les images des faits réels dans toutes les représentations de notre vie politique et sociale : c’était une joie de suivre cette intelligence qui cherchait avec tant de bonne foi, avec tant de mépris du convenu, les vérités encrassées par une épaisse couche d’encre d’imprimerie.

Le voyageur nous rapporte aujourd’hui d’Égypte de nouvelles réflexions. Je viens de lire l’Égypte et les Égyptiens avec une double curiosité. Le sujet est des plus intéressans parmi ceux qui peuvent occuper un Français de nos jours ; et j’attendais de l’homme qui le traite les vues personnelles dont il est coutumier. Mon attente n’a pas été déçue : c’est bien le même procédé d’investigation directe qu’il appliquait aux lois sociales, la même crainte d’être dupe des préjugés, des apparences ; avec un grain de scepticisme et d’ironie,