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ne les recommanderont au public qu’après s’être entourées de tous les renseignemens exigés par la prudence la plus sévère.

Gardons-nous de croire qu’il y ait une opposition d’intérêt quelconque entre les associations financières et les banques de dépôts : ces deux forces ont réciproquement besoin l’une de l’autre, et se prêtent un mutuel appui. Les capitaux déposés chez les secondes ne sont pas destinés à y rester indéfiniment, en se contentant des taux d’intérêt, en général minimes, qui leur sont servis. Ils y sont au contraire dans l’attente d’occasions favorables de placement. D’autre part, en s’employant à l’achat de valeurs, les capitaux ne quittent pas définitivement les banques où ils étaient déposés. Ils y reviennent sous forme de titres, lesquels paient des droits de garde, des commissions d’encaissement de coupons et d’obligations amorties, donnent lieu à des ordres d’achats et de ventes. Ici comme ailleurs le mouvement engendre le mouvement, les forces diverses, à condition d’être bien organisées, agissent dans le même sens et contribuent à l’harmonie de l’ensemble. Chacune des espèces de banque que nous avons définies trouve l’occasion de réaliser des bénéfices légitimes et de rendre des services à la communauté ; mais la condition première est que chacune ait la perception nette de son rôle, se trace une ligne de conduite et la suive inflexiblement. Il est nécessaire que la part du hasard soit réduite au minimum. N’est-ce pas là le critérium de toute entreprise sérieuse ? Or, la banque pure diminue, dans une proportion rarement atteinte, cet aléa inséparable des choses humaines ; elle peut et doit se tenir à l’écart de toute spéculation de Bourse, même de cette spéculation légitime dont nous avons essayé de prouver, au début de ce travail, la nécessité dans la vie quotidienne des nations et des individus ; elle est, en dernière analyse, comparable à une véritable industrie, elle en emploie les procédés, et en obtient les résultats réguliers, à condition d’en suivre les règles. Les capitaux sont sa matière première, qui se façonne et s’adapte aux divers emplois dont elle est susceptible dans ces vastes usines qu’on appelle des maisons de banque ou des établissemens de crédit.


RAPHAEL-GEORGE LEVY.