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gigantesques tapissèrent les murs de la ville. Mais cette réclame ne lui parut pas suffisante. Un matin, l’électeur reçut une carte postale où l’heure et le lieu de la réunion étaient soigneusement indiqués. Attention délicate qui fut appréciée à cause de son caractère individuel. On se décida à confier la présidence de l’assemblée à un alderman, gros négociant de Barton, l’un des plus fort imposés. Les leaders du parti décidèrent qu’ils entoureraient leur candidat et se grouperaient autour de lui sur la platform. Pensant à tout, toujours en éveil, Cook examina lui-même les affiches, s’assura qu’elles portaient bien le nom et l’adresse de l’imprimeur. Il fit expédier aux électeurs la profession de foi de Richard par la poste, moyen sûr qu’il jugeait plus digne, bien supérieur, depuis les réformes, à l’ancien electioneering hurlyburly. Avant le meeting il acquitta lui-même tous les frais que nécessitait la réunion, location de la salle, placards, en général toutes les notes dépassant deux livres sterling. Enfin, il se rendit au local choisi une heure avant l’ouverture et quand on fut placé, quand la séance fut ouverte, il se mit discrètement en arrière, évitant ainsi de se donner de l’importance, de paraître too prominent.

Elle était houleuse, la salle, et médiocrement disposée en. faveur de Winterbottom, lorsque celui-ci s’y présenta le 24 juin à 8 heures du soir, flanqué, nous l’avons dit, de six personnages importans du parti conservateur. On était dans un de ces lecture halls, comme il s’en rencontre partout dans les villes anglaises. La veille peut-être, des conférenciers, des voyageurs y avaient exposé leurs idées sur les questions du jour ou sur les résultats d’une exploration dans des territoires lointains qu’il convenait de saisir. L’auditoire se composait d’élémens divers. Le parti radical et home-ruler y était largement représenté. De temps en temps des hourras s’élevaient : Three cheers for M Gladstone ! Une partie de l’assemblée applaudissait bruyamment. Mais une contre-manifestation ne tardait pas à se produire, et cette fois, c’était le nom de lord Salisbury ou celui d’A.-J. Balfour que les amis de Richard lançaient à toute volée à leurs partisans. Un instant après, c’était sur la personnalité, — sacro-sainte ou détestée, — de MM. Sexton ou O’Brien que la foule se livrait à des démonstrations tumultueuses. Quand le gros alderman Oaksmith monta au fauteuil, tout de suite le tapage commença. « Gentlemen, dit-il, je n’ai pas besoin de vous présenter mon éminent (rires)… mon éminent ami Richard Winterbottom. Vous le connaissez (oui, oui) et vous allez l’entendre. Je vous demande de voter pour lui, de l’envoyer représenter au parlement les intérêts de la ville (Bravo 1 — Jamais ! — We’ll thrash him !) » Richard se leva, après ce bref préambule, et fit deux pas en avant, car il s’était jusque-là dissimulé derrière le