Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 118.djvu/959

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en déclarant nettement que les enfans catholiques, là où ils n’ont pas d’écoles de leur religion, peuvent fréquenter les écoles laïques dont l’enseignement offre des garanties suffisantes de neutralité.

Cette décision est destinée à mettre fin aux polémiques violentes, qui se poursuivaient à cet égard entre Mgr Ireland, l’archevêque bien connu de Saint-Paul, soutenu par le nonce, et Mgr Corrigan, l’archevêque de New-York. On sait que l’école, aux États-Unis, est une charge de la commune ; mais, en vertu du premier amendement de la constitution, d’après lequel le congrès ne doit faire aucune loi établissant une religion d’État, et par suite d’ailleurs de la multiplicité des sectes religieuses, l’école est strictement neutre. Aucune instruction confessionnelle n’y est donnée ; c’est à la famille de l’enfant et à ses coreligionnaires d’y pourvoir. Mais l’établissement d’écoles libres n’était pas partout possible, et la solution libérale de Rome a été accueillie avec soulagement de l’autre côté de l’Atlantique.

Cet esprit d’apaisement du pape est si connu, l’opinion, dans les deux mondes, fonde sur lui tant d’espérances, qu’on a plusieurs fois, et récemment encore, prêté à Léon XIII des projets d’encyclique sur le désarmement européen. Mais ici toute action internationale paraîtrait, non-seulement vaine, mais susceptible d’aller contre son but. Soulever la question du désarmement dans un congrès, ce serait peut-être, à plus ou moins bref délai, provoquer la guerre. Aussi, quelque ingénieuse que soit sa diplomatie, quelque vaste que soit son rôle, le pape le sait et s’abstient. On se figure volontiers, en France, qu’il n’y a pas en Europe d’autres inquiétudes, d’autres rancunes que les nôtres, et que l’Alsace-Lorraine soit le nœud gordien de la paix du monde. Il est sur les frontières russo-allemandes, où la guerre de tarifs bat aujourd’hui son plein, il est entre Vienne et Pétersbourg de vieux griefs et des plaies encore fraîches, que le temps seul cicatrisera. Un vieil administrateur prétendait que les affaires, en apparence insolubles, ne s’arrangeaient jamais si bien que dans les cartons où on les laissait dormir. La question du désarmement est de celles-là. S’il doit se faire, il se fera tout seul.

On n’en peut dire autant des réformes que le ministère hollandais a entreprises, et qu’en ce moment, tandis que presque tous les parlemens sont en vacances, les chambres continuent de discuter péniblement dans les salles du Binnenhof, où le thermomètre a marqué dernièrement plus de 100 degrés Fahrenheit. Les innovations financières, mises en vigueur dans les Pays-Bas, ne nous paraissent pas à l’abri de la critique. L’impôt sur le capital, variant progressivement de 1 à 2 florins pour 1000, équivaut à un prélèvement moyen de 2 1/2 à 5 pour 100 du revenu des capitaux. Ce n’est pas une lourde charge, surtout pour les plus gros contribuables, ceux qui, par exemple, à Amsterdam, ont déclaré des fortunes de 50 et 100 millions de francs ; mais, comme