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Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 119.djvu/721

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qu’on puisse dire le nombre de pages d’une pièce déposée sous enveloppe scellée ; celui qui aurait pu les compter aurait dû, en même temps, être en mesure de les parcourir, à moins que le roi des Belges n’ait fait lui-même connaître ce détail, ce qui ne lui ressemble guère.

Cependant il est vraisemblable que la neutralité du Congo, en connexité avec celle de la Belgique, est du nombre des points traités dans le testament royal. On sait que le Congo a été constitué par le roi Léopold avec ses ressources personnelles, sans participation aucune, jusqu’en 1890, du gouvernement et des finances belges, et que la conférence internationale de Berlin, en 1885, l’a reconnu comme État « indépendant. » Depuis, les chambres votèrent des subsides pour la continuation des explorations, à la demande du roi qui s’engageait à transmettre le Congo à la Belgique, et par là le gouvernement, et non plus seulement le roi, entra franchement dans la politique d’extension coloniale. Pourrait-il aller plus loin et assumer les charges, énormes pour un petit État européen, d’une grande possession au plein centre de l’Afrique ? C’est une question qui ne tardera pas à se poser, et qui sera d’une solution facile : il ne s’agira ici que d’une conférence internationale de pure forme pour achever l’œuvre de la révision belge.

Cette révision de la constitution originelle du royaume, demandée pour la première fois il y a vingt-trois ans, et dont la discussion se poursuivait depuis trois années sans intervalle, est maintenant un fait accompli. Seul, l’article relatif à l’éligibilité sénatoriale l’arrêtait encore, et avait donné lieu à plus de discours et de propositions que l’article même qui réglait la composition du corps électoral. Après avoir, au mois d’avril dernier, sous la pression des événemens dont on se souvient, fait des concessions sur le recrutement des députés, la majorité cléricale de la chambre voulait obtenir au moins un sénat conservateur. Telle qu’elle se trouve définitivement organisée, la chambre haute comprendra deux catégories de membres : un quart sera élu par les conseils provinciaux sans aucune condition de cens, les trois autres quarts tiendront leur pouvoir du suffrage universel, mais ils seront recrutés parmi les personnes payant un minimum de 1,200 francs de contributions.

Le nouveau sénat sera donc assez différent de l’ancien, où le cens nécessaire à l’éligibilité était de 2,116 francs, et qui ne comptait aucun capacitaire ; la seconde chambre différera encore davantage de celles qu’elle remplacera, puisqu’elle sera élue, non plus par 120,000, mais par 1,200,000 électeurs, dont 500,000 investis du vote plural.

En quittant leur constitution bourgeoise de 1831, qui leur a donné près de deux tiers de siècle d’ordre et de liberté, pour un régime plus démocratique, les Belges suivent le courant qui soumet de plus en plus le monde à la suprématie du suffrage universel, et qui, là même où ce